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Lorsque tous trahiront
Grand format
Inédit
Tout public
256 p. ; 20 x 15 cm
ISBN 978-2-38553-024-2
Mort dans un panier de crabes
Sigmaringen. Devenu enclave française, la ville et son château sont devenus un lieu d'exil pour un millier de collabos fuyant l'avancée des troupes alliées en 1944. Personnalités vichystes, journalistes dévoyés, miliciens de toutes les obédiences s'entassent dans quelques kilomètres carrés, préparant qui leur fuite, qui leur revanche, qui une illusoire révolution intérieure qui verrait la population française manipulée se soulever contre l'occupant yankee et qui, tous, sont prêts à trahir tout et tout le monde pour sauver leur peau. C'est dans ce cloaque qu'exerce un ancien lieutenant fasciste, membre convaincu de la LVF puis de la SS française, chargé de former des troupes pour reprendre le pouvoir. C'est alors que tombe la nouvelle de l'assassinat de Jacques Doriot, le leader du PPF, l'un des plus importants collabos du pays. Mais si sa mort semble être le fait d'un mitraillage ciblé, rien ne colle. Dans ce panier de crabes où tout le monde joue double jeu, qui avait des raisons de favoriser la mort de l'ancien chef de parti ?
Premier lauréat du Prix du roman d'espionnage, décerné par un jury d'agents du renseignement et d'auteurs, Pierre Olivier entre avec ce premier roman dans la cour des grands et le mérite amplement. D'espionnage, il sera question, un peu, dans ce beau roman historique, mais pas forcément tel qu'on l'entend. Ici, à mesure que l'intrigue se déroule et que les motivations troubles des protagonistes se révèlent, c'est l'imbrication des intervenants (nazis, collaborateurs, police, armée américaine) qui donne cette coloration à un récit où dominent surtout les manipulations individuelles alors que chacun lutte pour se sortir le moins mal possible d'une situation désespérée. Pourquoi enquêter sur la mort d'un Doriot alors que les alliés se rapprochent ? Quelle valeur aura la réalité dans un moment où tout le monde cherche à réécrire l'histoire à son propre avantage ? Partant des circonstances bien réelles de la mort de Jacques Doriot, qui reste, aujourd'hui encore controversée, Pierre Olivier dresse un récit tout en nuances de gris et d'une sobriété bien venue. Dans un style sec, sans fioritures (on est bien loin de Céline, qui décrira son exil à Sigmaringen dans D'un château l'autre), il propose sa propre version de l'attentat, plutôt convaincante, et si on pourrait peut-être lui reprocher une fin un peu trop abrupte, on ne se laisse pas moins embarquer dans la sinistre débâcle qu'il met en scène. Un auteur à suivre...
Citation
Alors, je pense que nous n'étions plus vraiment français, mais pas allemands pour autant. Européens ? Je n'y crois pas. L'Europe a été française et puis elle a été allemande. Demain, elle sera peut-être russe et est-ce vraiment le pire qu'elle soit russe ?