Je voyage seule

En temps ordinaire, on dénombre 38000 cas de suicide annuellement. Pour l'an dernier, cela représente 4500 décès supplémentaires. De ce que je sais, le taux a grimpé à 15,5 sur le premier trimestre de cette année. En projection annuelle, on comptera 8400 suicides de plus au 31 décembre prochain.
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samedi 27 avril

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Roman - Thriller

Je voyage seule

Tueur en série MAJ vendredi 23 décembre 2016

Note accordée au livre: 5 sur 5

Poche
Réédition

Tout public

Prix: 8,5 €

Samuel Bjørk
Det henger en engel alene i skogen - 2013
Traduit du norvégien par Jean-Baptiste Coursaud
Paris : Pocket, octobre 2016
580 p. ; 18 x 11 cm
ISBN 978-2-266-26622-2
Coll. "Thriller", 16611

Coup d'essai, coup de maître

Le livre s'ouvre, comme très souvent maintenant, sur un bref prologue évoquant la naissance de père inconnu, à Hønefoss, en Norvège, le 28 août 2006, de la fille de Katarina Olsen, institutrice âgée de vingt-cinq ans, morte en couches le même jour. L'enfant disparaît de la clinique avant d'avoir pu être confiée à sa grand-mère et ne sera jamais retrouvée. Deux mois plus tard, un infirmier suédois du nom de Joachim Wicklund est retrouvé pendu dans son appartement, laissant cette explication très laconique, sur un morceau de papier : "Je suis désolé."
Six ans plus tard, l'intrigue s'ouvre, de façon banale elle aussi, sur la découverte dans la forêt, par la chienne de Walter Henriksen, du cadavre d'une fillette dont on apprendra plus tard qu'elle se prénomme Pauline, pendue à un arbre (après avoir été tuée par anesthésie), vêtue comme un poupée, munie d'un cartable rempli d'objets ne lui appartenant pas (car elle ne va pas encore à l'école, n'ayant que six ans) et d'une de ces pochettes dont les compagnies aériennes munissent les enfants voyageant seuls, et portant le chiffre 1 gravé sur un ongle (ce qui laisse redouter un tueur en série). Puis nous faisons connaissance avec Mia Krüger, ancien membre d'une unité de police spécialisée dans l'identification des criminels au sein de laquelle elle se faisait remarquer par la subtilité de ses analyse psychologiques, dont la jumelle, Sigrid, adoptée comme elle, est morte d'overdose administrée par son petit ami Markus Skog le 18 avril 2002. Elle a décidé de mettre fin à ses jours, sur une île au large de Trondheim, deux semaines plus tard, le 18 avril de l'année ; puis avec son collègue le commissaire Holger Munch (sans cesse obligé de préciser qu'il n'est pas de la famille du célèbre peintre), qui est en délicatesse avec sa hiérarchie et a, comme tous ses semblables ou presque de la littérature policière actuelle, des soucis avec les femmes : sa mère, son ex-épouse, sa fille... Ces deux personnes sont en fait très proches, car non seulement elles ont travaillé ensemble mais Mia a abattu Martin Skog, ce qui a valu une sanction à Munch, son supérieur, qui l'a couverte, après quoi elle a sombré dans la dépression. Et, comme il est chargé de l'enquête sur la fillette pendue, il vient demander à Mia de reprendre du service auprès de lui, ce qu'elle refuse. Mais une illumination soudaine la fait changer d'avis. Entretemps, nous voyons un homme de main toucher l'acompte promis sur son prochain contrat, vraiment très spécial, et Tobias Iversen (treize ans) et son frère (qui sont pratiquement livrés à eux-mêmes par leurs parents) découvrir un second cadavre, celui de Johanne, même âge, même mise en scène, sauf le chiffre 2. Fin de la première partie.
Sur cette base déjà complexe, les choses se compliquent encore. La police est sur les dents et la priorité absolue, car la nation entière est traumatisée et les parents (ou grands-parents, comme Holger Munch pour Marion) de fillettes de six ans sont aux cent coups, surtout quand on apprend qu'il a été fabriqué dix robes de poupée comme celles de Pauline et Johanne, commandées par un homme portant un aigle tatoué, et que le criminel semble narguer la police, par exemple en tuant un chien de la même façon que les fillettes ou en contactant la presse pour lui demander de choisir entre les deux prochaines victimes. L'action essaime alors dans divers domaines : un élevage de porcins, le théâtre, une secte, le codage informatique, une maison de retraite, un club échangiste et... le peintre Edvard Munch (le lecteur n'a donc pas la possibilité de s'ennuyer). Mais il s'avère bientôt que c'est l'autre Munch, Holger, le commissaire, qui est en fait au cœur de l'affaire. À moins que...
Malgré la complexité d'une intrigue semblant miser au départ sur la banalité le récit est passionnant et chacun de ses divers rebondissements est parfaitement motivé. Le lecteur a le sentiment que l'auteur ne brouille jamais les pistes délibérément et qu'il découvre en même temps que lui les différentes étapes et la solution de l'énigme, ce qui n'est pas fréquent dans un genre où la manipulation est coutumière. Le dénouement est bien amené, sans précipitation ni fausses pistes aux grosses ficelles, et relie bien tous les fils (pourtant nombreux) de l'intrigue, ce qui le rend facile à suivre. Seules les dernières pages sacrifient un peu à la vogue du dramatique cinématographique. Comme, en outre, la narration est précise, claire et nerveuse, et bien rythmée, la langue drue et efficace, et le dialogue sonne juste, l'expérience de lecture est excellente à tous points de vue. Si l'on vous demande comment écrire un polar, vous saurez donc où trouver la réponse.

Citation

De toute manière, elle n'arriverait pas à trouver le sommeil. Autant prendre une bière. Et essayer de réfléchir un peu.

Rédacteur: Philippe Bouquet jeudi 22 décembre 2016
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