Rendez-vous à Bagdad

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Roman - Espionnage

Rendez-vous à Bagdad

Géopolitique MAJ lundi 18 juillet 2011

Note accordée au livre: 4 sur 5

Poche
Réédition

Tout public

Prix: 5,2 €

Agatha Christie
They Came to Baghdad - 1951
Traduit de l'anglais par Marie-Caroline Aubert
Paris : Le Masque, avril 2011
314 p. ; 18 x 11 cm
ISBN 978-2-7024-3603-5
Coll. "Agatha Christie", 3

Le Bagdad de lann 51

Les éditions du Masque proposent une nouvelle traduction de Rendez-vous à Bagdad, un roman d'espionnage fleur bleue et nostalgique d'une époque qui s'achève dans l'après Seconde Guerre mondiale signé Agatha Christie et écrit en 1951. L'idée est louable tant il est important de rafraîchir les traductions surtout en ce qui concerne des romans classiques, mais elle aurait dû s'accompagner d'un travail éditorial malheureusement absent. Les fautes sont nombreuses et gênent quelque peu la lecture pour peu que l'on se rende compte de leurs multiples présences. Si Bagdad est un nid d'espions intrépides qui resserrent un nœud coulant autour de la gorge du dernier espion britannique digne de ce nom et qui finira par y laisser la vie, c'est également une ville cosmopolite, embourbée entre monde dit civilisé et autochtone à l'image de Casablanca telle qu'on la voit dans le film de Michael Curtiz avec Humphrey Bogart.

Rendez-vous à Bagdad, c'est tout d'abord la rencontre impromptue sur un banc londonien de Victoria et Edward. Un coup de foudre a priori pour rien vu que lui se rend dans un centre culturel dirigé par le Dr Rathbone en Irak. Mais les aléas d'une intrigue font que Victoria, qui ne sait rien de cet homme tout juste démobilisé si ce n'est qu'il est séduisant, se retrouve à chaperonner une dame en route pour Bagdad alors que dans le même temps, d'autres personnages convergent ou sont amenés à y converger. Car dans cette ville doit se dérouler une conférence du genre de celle de Yalta. Un espion intrépide de la Couronne, qui en remontrerait à James Bond et que rien n'effraie plus que la horde de tueurs à ses trousses, est porteur de certaines preuves d'une non moins certaine machination d'un pays de l'Extrême Orient. Et ses preuves doivent être étalées au petit jour de la conférence.

On n'est pas la Reine du crime pour rien même quand on se lance dans un étrange roman d'espionnage loin des sentiers battus de Saint Mary Mead. L'intrigue qui semble dès le premier abord singulièrement décousue avec un personnage féminin qui n'est pas sans rappeler par son caractère l'Imogène d'Exbrayat qui fera son apparition dix ans plus tard, est bien ficelée. Rien n'est laissé au hasard et s'il se dégage du roman un sentiment d'heureuse félicité, de légèreté insouciante, on découvrira au final une sourde machination que n'aurait pas renié Hitchcock au moment de demander à Doris Day d'entonner "Que sera sera" dans L'Homme qui en savait trop.

Victoria Jones, qui possède le charme et la réussite insolente de l'agent secret amateur (on en revient à Hitchcock ou plus précisément à John Buchan quand Richard Hannay se lance dans Les 39 marches) marche sur des œufs en plein désert, est enlevée, ligotée, assoiffée, prise au piège mais s'en sort, se découvre une passion pour l'archéologie (à l'instar d'Agatha Christie qui épousa en seconde noce un archéologue plus jeune qu'elle selon l'adage que plus vous vieillissez plus il s'intéresse à vous) et, évidemment, permet à son pays de remporter une victoire de prestige contre le reste du monde tout en pansant ses plaies amoureuses de la meilleure des façons.

Sous couvert d'un roman à l'eau de rose avec une pointe d'exotisme et d'aventure, Agatha Christie réalise encore un portrait acidulé de la grande bourgeoisie britannique. Même la désargentée Victoria Jones n'est pas épargnée. Cette "gourde sympathique" sur qui repose l'intrigue est typique de la jeunesse telle que la voit Agatha Christie. Tout feu tout flamme, avec un brin de bon sens dans une cervelle de moineau. Aucune conscience de ses actes. Une fonceuse adepte de la réflexion a posteriori. L'on ne peut s'empêcher de penser qu'elle n'a pas tort. Bien sûr, elle s'expose à des retours de bâtons, mais elle semble les accepter de bonne grâce au milieu d'hommes décisionnaires absolument pas débonnaires, graves et totalement inefficaces.
Un ouvrage culotté à l'image d'une héroïne qui n'en rate pas une dans un univers archéologique moyen-oriental. Les amoureux de l'Orient Express, des traversée du Nil et d'un arrêt en Mésopotamie en seront pour leurs frais (pourvu qu'ils ne focalisent pas sur les fautes)...

Citation

La torture, c'est très vieux jeu. Une petite piqûre et vous répondez en toute sincérité à leurs questions sans même vous en rendre compte. Nous vivons à une époque scientifique.

Rédacteur: Julien Védrenne dimanche 17 juillet 2011
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