Les Risques de l'improvisation

Roman - Noir

Les Risques de l'improvisation

Sur un riff de saxo

Élysée Gaumont a cinquante ans ans. Musicien de jazz, il vit au fil du temps, improvisant sa vie comme sa musique. Mais un AVC le rappelle à la dure réalité. Alors qu'il se repose à Marseille, il est témoin d'une affaire très étrange : une jeune fille, lui demande de l'aide pour son vélo, entre dans une église et n'en ressort jamais. Quelques jours plus tard, le même Élysée Gaumont joue pour une fête privée et découvre que son commanditaire est le père de la jeune fille. À peine le temps de jouer quelques notes que le monsieur est retrouvé mort...

Delphine Solère se nourrit du jazz pour son roman en utilisant des figures imposées - la jeune fille, le détective malgré lui, des criminels, une beauté fatale, un amour de jeunesse qui pourrait laisser croire à une vie conjugale apaisée, des trafics avec la Belgique (diamants ? Drogue ?). Ces éléments sont l'objet de variations, de tempos lents ou rapides pour constituer l'ossature du texte. Mais il faut des contrepoints. Là, un peu d'humour avec le personnage d'Élysée Gaumont qui fait le joli cœur auprès de jeunes femmes mais qui a du mal à supporter que son amour puisse lui faire une infidélité (mauvaise foi du mâle en description tendre et ironique) ou avec un cadavre picoré par des poulets ou encore un héros jazzman épicurien qui ne doit plus faire d'excès. Il faut également un thème qui revient et assure la continuité : outre la solution de l'énigme posée, il y a là aussi un petit contrepoint car, en désespoir d'argent, Élysée Gaumont travaille pour un chanteur ringard qui a écrit les pires paroles de variété du siècle (et pourtant il y a eu de la concurrence) et il doit essayer d'y apposer des mélodies, ce qui lui permet de citer régulièrement des textes confondants. Le texte oscille entre ses limites avec une enquête de facture très classique et qui sert surtout de prétexte à décrire un personnage en proie à ses propres contradictions, entre désirs de bonne chair et de femmes, entre gorgées alcoolisées et jazz flamboyant et qui découvre les joies du vélo, des légumes bio cuits à l'eau, la jalousie et les petits contrats pour assurer les fins de mois. En musique, comme en littérature, sans les risques provoqués par l'improvisation, on ne peut pas espérer arriver à une réussite.

Citation

J'avais chaussé des lunettes de soleil et enfilé un costard de maquereau comme Vauch en conservait dans son armoire pour les soirs de gala chez les rupins.

Rédacteur: Laurent Greusard mercredi 30 août 2023 partager : | |