Petites morts à Sonagachi

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mercredi 30 avril

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Roman - Noir

Petites morts à Sonagachi

Social - Corruption - Urbain MAJ lundi 24 mars 2025

Note accordée au livre: 4 sur 5

Grand format
Inédit

Tout public

Prix: 23,5 €

Rijula Das
A Death in Shonagacchi - 2021
Traduit de l'anglais (Inde) par Lise Garond
Paris : Le Seuil, mars 2025
376 p. ; 23 x 15 cm
ISBN 978-2-02-150727-0
Coll. "Cadre noir"

Calcutta Noir

Le titre français du roman de Rijula Death est bien plus explicite. En effet, la petite mort peut faire référence à une mort sans importance, et c'est le cas, puisque le crime qui ouvre presque le livre est celui d'une prostituée sans importance, un crime horrible mais qui ne semble pas concerner grand monde, mis à part ceux qui devront nettoyer la chambre de la victime, dans son bordel. Mais c'est aussi une référence évidente à l'orgasme masculin et c'est alors la petite mort qu'elle est censée provoquer, celle que viennent rechercher les clients du quartier de Sonagachi (lui aussi cité dans le titre). Parmi ces clients, un écrivain de récits érotiques qui vit chichement mais est tombé amoureux d'une autre prostituée, Lalee, voisine de chambre de la victime. Cela l'obligera même à fuir le bordel lorsque le sang coulera sous la porte jusqu'à la chambre où il se trouve. Pour Lalee, c'est presqu'inespéré car la mort de sa voisine lui vaut une "promotion". Elle peut devenir l'escort en vogue, la "vitrine" du bordel. C'est du moins ce qui lui propose sa patronne qui l'envoie dans un hôtel pour rencontrer un bon client afin de voir si elle fait l'affaire. Mais Lalee est un peu troublée car sa patronne vient aussi d'acheter deux jumelles pré-pubères qui pourraient devenir de nouvelles attractions intéressantes. Et pendant ce temps, le commissaire de police du quartier essaie d'en faire le moins possible d'une part parce que les pots-de-vin dans le quartier, c'est une partie de son salaire et, d'autre part, si l'on arrête l'assassin, on va découvrir que c'est un riche pervers et les répercussions seront encore pires pour lui...

La littérature policière en provenance d'Inde est assez rare dans nos contrées (même si là, nous sommes face à une Indienne plutôt internationale) et sa description du quartier des bordels à Calcutta, avec ses souteneurs, ses maisons closes qui achètent des enfants de la campagne, qui corrompent (facilement) la police, les ONG qui tentent de lutter contre ces trafics d'êtres humains, est un dépaysement assuré. Les personnages centraux sont justement une prostituée qui après des débuts classiques pourrait "monter en gamme" (ce qui l'intéresse) et un client naïf qui entretient une relation complexe avec elle (compliqué sans doute par le fait qu'il est visiblement masochiste). Le récit évoque la mort et les derniers chapitres permettront de découvrir la vérité autour de cette mort. Mais le roman de Rijula Das ne centre pas son intrigue sur l'assassinat, mais plutôt sur les vies de ses personnages qui tournent autour (le client, la prostituée, le commissaire, un souteneur, la présidente de l'association caritative) pour décrire la vie à Calcutta à travers la volonté de vivre ou de survivre de certains habitants déclassés. Si l'on apprécie ce côté documentaire, au sein d'une intrigue menée avec soin, on appréciera ce roman, plus ancré dans le réalisme que dans le noir stricto sensu.

Citation

Il y a des gens qui veulent que les femmes restent là où elles sont, qu'elles continuent à être battues, à être assassinées, à être sexuellement exploitées. Il y a des gens pour qui jouer le rôle du sauveur est plus important que de sauver qui que ce soit.

Rédacteur: Laurent Greusard lundi 24 mars 2025
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