Chat sauvage en chute libre

Le jour même où Son Holland arriva au camp pénitentiaire, menotté, à l'arrière d'un chariot tiré par des mulets, en compagnie de sept autres prisonniers, il sut qu'il finirait par s'évader, qu'il mourrait avant d'avoir passé dix ans dans un marais fumant, sous les pistolets et les fouets de Français impaludés qui avaient du sang noir dans les veines et un cœur dégénéré et corrompu.
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vendredi 19 avril

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Roman - Noir

Chat sauvage en chute libre

Ethnologique - Social - Prison MAJ mardi 18 mai 2010

Note accordée au livre: 5 sur 5

Grand format
Inédit

Tout public

Prix: 16 €

Mudrooroo
Wild Cat Falling - 1965
Traduit de l'anglais (Australie) par Christian Séruzier
Paris : Asphalte, mai 2010
166 p. ; 18 x 13 cm
ISBN 978-2-918767-00-8

Sur la piste

Dans les années 1960, en Australie, il ne fait pas bon être mal né. C'est le cas du personnage principal de Chat sauvage en chute libre. Plutôt, il est né sans avenir, sans perspective à part celle de la prison. Dès l'âge de neuf ans, il est confié à un centre de redressement. C'est là qu'il apprend tout. Là et dans le bush, bien entendu. Ses fréquentations ? Pas terribles, il faut bien l'admettre. Entre les Noongans (une tribu aborigène) et les bodgies (jeunes en révolte), il passe son temps à boire et à monter des petits coups qui ne lui rapportent pas grand-chose, si ce n'est le droit de repasser par la case prison. Il finit par s'y sentir comme chez lui. "La prison de Fremantle a été une sorte de refuge pour moi. Ils m'ont accepté ici comme j'ai moi-même accepté le désespoir et la futilité. Les autres ont su garder l'espoir. J'en connais même certains qui ont pris des résolutions, mais ils ne s'y tiendront pas et rechuteront." Son nom ? Nous ne le connaissons pas. Mais peu importe, nous savons qu'il est de sang mêlé (sa mère est aborigène et son père était blanc), et que, pour l'heure, il retrouve la liberté et lit En attendant Godot.

Il s'agit du premier roman écrit par un aborigène australien. Un drôle de roman qui file à toute vitesse. Construit entre le présent et de nombreux retours sur le passé, le texte donne cette impression de fuite inexorable. Une fuite vers où ? Difficile de savoir si quelqu'un connaît la réponse. Une fuite qui se heurte sans cesse aux différents clivages qui apparaissent comme autant de blessures et de rayures à l'âme du personnage principal : l'opposition entre la ville et le bush, entre les blancs et les aborigènes, entre ceux qui ont le droit d'espérer et les autres. Assurément, il fait partie des autres et ne peut opposer à cette réalité qu'un regard empreint d'indifférence. En attendant, il se nourrit de jazz et de juke-box, de filles et d'alcool, de belles sapes et de coups foirés.
On parle souvent de livres coups de poing, il s'agirait ici davantage d'une œuvre qui claque comme une porte qui se refermerait sur les doigts du personnage principal. C'est dans cette douleur que s'exprime toute la rancœur de Mudrooroo vis-à-vis de la société australienne des années 1960, des grands discours étudiants pour une assimilation "bidon", de ces barrières infranchissables et de cette volonté d'aller se perdre de l'autre côté.

NdR - Les éditions Asphalte ont été lancées par deux collaboratrices de k-libre, mais ce n'est pas une raison pour ne pas en parler. Alors bien sûr cette chronique peut être taxée de subjectivité. Et si ce n'était pas vrai ?

Citation

Dans les camps de Noongar, j'ai suivi une spécialisation pour devenir totalement inexploitable et saboter les efforts illusoires pour améliorer le sort des indigènes. J'ai également appris à boire comme un trou et coucher comme un sauvage.

Rédacteur: Gilles Marchand lundi 10 mai 2010
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