Vingt mille vieux sur les nerfs

Je suis une chose nouvelle. Une nouvelle chose qui existe depuis des siècles. Une nouvelle chose qui commence tout juste à trouver assez de liberté pour sortir, comme une créature qui aurait été conçue en même temps que l'homo sapiens, mais aurait dû vivre jusqu'à présent dans un puits profond en s'alimentant de racines et de l'humidité de la terre.
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Roman - Policier

Vingt mille vieux sur les nerfs

Historique - Social - Terrorisme MAJ lundi 08 mars 2010

Note accordée au livre: 5 sur 5

Poche
Inédit

Tout public

Prix: 7 €

Jean-Paul Jody
Miles Hyman (illustrateur de couverture)
Paris : Baleine, mars 2010
160 p. ; 18 x 12 cm
ISBN 978-2-84219-467-3
Coll. "Le Poulpe", 265
Le Poulpe

Ce qu'il faut savoir sur la série

Le Poulpe est un personnage libre, curieux, contemporain. C'est quelqu'un qui va fouiller, à son compte, dans les failles et les désordres apparents du quotidien.
Quelqu'un qui démarre toujours de ces petits faits divers qui expriment, à tout instant, la maladie de notre monde. Ce n'est ni un vengeur, ni le représentant d'une loi ou d'une morale, c'est un enquêteur un peu plus libertaire que d'habitude, c'est surtout un témoin.

Des recettes du troisième âge

Le Poulpe ne reconnaît plus le Pied de Porc à la Sainte-Scolasse. Fumer y est interdit, les clients ont changé, maintenant c'est costume, cravate, téléphone et ordinateur portables, il n'y a même plus de pieds de porc ! Cheryl préfère essayer de comprendre le monde devant le JT que de faire des papouilles à son Poulpe, alors Gabriel Lecouvreur fédère une bande de petits vieux pour faire revenir certaines habitudes. Ensemble, ils iront chaque mercredi manger des pieds de porc à la Sainte-Scolasse. Seulement voilà, ces vieux-là "à vingt ans, ils s'engageaient contre Franco, résistaient aux nazis, faisaient sauter des trains, imprimaient des tracts, survivaient aux camps de la mort, certains sont passés dans les caves de la rue Lauriston sans rien lâcher. D'autres se sont battus contre la torture en Algérie. Après Buchenwald et Dachau, ils pensaient que ces saloperies seraient finies, ils retrouvent Abou Graib et Guantanamo, et Dick Cheney pour justifier l'infamie." Et ces vingt mille vieux (enfin, cinq, puis huit, puis douze…), ils n'ont vraiment rien à perdre. Tout au plus, trois mois de leur vie. Alors, ils vont mettre à profit ces derniers jours pour tout faire péter, suivant en cela l'article 35 de la Constitution montagnarde de 1793 : "Quand le gouvernement viole les droits du peuple, l'insurrection est, pour le peuple et pour chaque portion du peuple, le plus sacré des droits et le plus indispensable des devoirs." Le tout sous l'œil de moins en moins crédule du Poulpe qui va chercher qui manipule ces petits vieux.

"De mémoire de vieux, on avait jamais vu ça !", l'expression hante les journaux télévisés à chaque catastrophe naturelle française. La mémoire des vieux, Jean-Paul Jody nous la fait autrement resurgir. Avec énergie et fulgurances. Ils sont tous là, autour d'une autre Cerise que celle qui nous bassine dans la pub : Gaspard, Ninette, Deboize, Grand-Robert, Moussa. Tous avec leurs souvenirs et leurs combats, qui ont fait l'Histoire vont alors la refaire. Avec une autre image du "qu'est-ce qu'être Français". Dans beaucoup de pays, le vieux représente la sagesse. Et la sagesse, semble nous dire Jean-Paul Jody pardonne au "désespéré qui a pris les armes pour sortir de son désespoir". Et il n'est pas le seul à répéter ces propos de l'abbé Pierre tout au long d'un roman où le Poulpe subit un cours de morale, et nous aussi. Il y a fort longtemps qu'un "Poulpe" n'avait laissé une si belle impression...

Citation

Un Noir a pris l'Amérique comme on prend une pucelle, avec grâce et manières mais quand même un peu à la hussarde.

Rédacteur: Julien Védrenne samedi 06 mars 2010
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