La Dernière ville sur Terre

Le confessionnal était pour lui un résumé de la civilisation ; c'était même l'exercice de civilisation par excellente. Le confessé avait beau connaître le confesseur, et le confesseur, le confessé, cela ne retirait rien à la sincérité de ce moment, ni à la pureté de l'intention, pas plus qu'à la beauté sombre de la rédemption.
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Roman - Thriller

La Dernière ville sur Terre

Politique - Historique - Social MAJ lundi 23 janvier 2023

Note accordée au livre: 4 sur 5

Grand format
Inédit

Tout public

Prix: 24 €

Thomas Mullen
The Last Town On Earth - 2006
Traduit de l'anglais (États-Unis) par Pierre Bondil
Paris : Rivages, janvier 2023
554 p. ; 23 x 16 cm
ISBN 978-2-7436-5844-1
Coll. "Noir"

Monde dans la douleur

Aux États-Unis, au début du XXe siècle, des échauffourées violentes ont lieu entre ouvriers et industriels. Ces derniers entendent développer le capitalisme alors que les premiers ont des revendications sociales. S'appuyant sur la police, sur les agences de détectives, sur des groupements divers de milices, les industriels font le plus souvent plier les syndicalistes et autres anarchistes. Un de ces patrons de l'industrie, Philip Worthy, qui a des visées sociales, décide de créer une petite enclave dans l'État de Washington, en plein milieu des forêts qui doivent servir de base à sa scierie. Il implante une usine et des maisons, puis instaure une utopie modeste qui attire des ouvriers par des salaires plus alléchants et des conditions de travail qui se révèlent aussi être l'occasion d'une meilleure production, se vendant mieux. Les villes alentour, et leurs patrons, jugent cette concurrence déloyales, mais ne savent comment réagir. Commence alors la Première Guerre mondiale, qui s'invite même aux États-Unis. Certains disent qu'elle a pour but de détruire les barbares allemands, d'autres que les riches fortunes américaines ont tellement financé les Anglais et les Français qu'il faut à présent soutenir ces pays pour pouvoir espérer se rembourser sur la bête. Le gouvernement va alors transformer des lois afin de pouvoir pourchasser les pacifistes et renforcer l'enrôlement de toute la population masculine. Philip Worthy signe de nombreux papiers pour faire de ses ouvriers des agents économiques importants qu'il convient de dispenser de la conscription. C'est pour les surveiller et essayer de les coincer que les industriels vont envoyer une équipe dans la ville, d'autant plus que des déserteurs auraient fui un camp militaire voisin. Mais alors qu'ils arrivent, ils découvrent que la ville est protégée et qu'il est interdit d'y entrer. De fait, les données ont changé car l'épidémie de grippe espagnole commence à faire des ravages. Et Philip Worthy a décidé de protéger sa ville en créant une sorte de quarantaine. Avec l'aide du docteur Banes, il surveille ses "ouailles". Un soir, un premier soldat tente de passer la "frontière" et est abattu par Graham sous les yeux de Philip, le fils de Worthy. Troublé, Philip qui entame une relation amoureuse avec une jeune fille de la petite ville, ne sait que faire le lendemain quand il se trouve de nouveau de garde, seul, et qu'un autre soldat se présente. Il ne parvient pas à tirer et choisit d'entraîner le soldat dans une cachette. Mais il est repéré...

Le roman de Thomas Mullen, qui s'inspire de La Peste d'Albert Camus, ne fait pas partie de la série que l'auteur a entamé qui aborde les problèmes raciaux à Atlanta dans les années 1950. Mais on retrouve ici le soin apporté à l'histoire et à ces mouvements sociaux, avec de nombreuses références aux luttes syndicales, aux difficultés d'organisation des partis de gauche, aux forces de la répression qui usent de la violence pour régler les problèmes. La modeste utopie, nommée de manière allégorique Commonwealth, se trouve au cœur d'attaques diverses : les forces politiques contraires, symbolisées par les villes alentours, la guerre qui menace le tout, l'épidémie qui ravage les lieux et même les forces internes, la lâcheté de certains, les divisions au cœur même de la ville, surtout qu'il faut choisir de manière dramatique (mourir, partir pour éviter la quarantaine, se nourrir). Thomas Mullen reconstitue avec soin, à travers des personnages emblématiques, mais qui ne sont pas uniquement des faire valoir car denses et humains, une partie de l'histoire des États-Unis à travers une époque un peu méconnue (sans parler de cette grippe espagnole qui est à présent connue principalement parce que nous en avons vécu une similaire avec le Covid-19). Un moment qui rappellera certains livres de Valerio Evangelisti. Thomas Mullen s'appuie sur une description des paysages, sur un soin aiguë apporté aux motivations des personnages et surtout sur une intrigue construite avec force pour raconter la vie d'une ville en temps de crise. Un grand roman noir.

Citation

Avec le volume croissant de malades et de mourants, ils ne s'étaient pas encore rendus aussi loin, en limite de la ville, dans cette rue isolée où logeaient les indigents les plus miséreux et les immigrants les plus récemment arrivés.

Rédacteur: Laurent Greusard jeudi 19 janvier 2023
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