Un cadavre sur le sable

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jeudi 28 mars

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Roman - Policier

Un cadavre sur le sable

Énigme - Disparition MAJ dimanche 03 janvier 2010

Note accordée au livre: 4 sur 5

Poche
Inédit

Tout public

Prix: 5,95 €

Josephine Tey
The Singing Sands - 1952
Traduit de l'anglais par Pascal Aubin
Paris : Le Masque, janvier 1998
256 p. ; 16 x 11 cm
ISBN 978-2-70242-815-3
Coll. "Les Reines du crime", 2345

Des sables d'Arabie à ceux des Hébrides le pas s'appelle B7

Les choix de traduction, en matière de titres, sont parfois de véritables curiosités – ainsi le sable de ce roman devient-il en français le nid d'accueil d'un cadavre qui, dans l'histoire, ne fréquente pas d'autre endroit que la couchette du train allant de Londres à Scoone, en Écosse – si l'on excepte la morgue du Yard, où il sera transféré après les premières constatations. Sables il y a pourtant, mais ils se contentent de chanter, quelque part sur une plage de l'une des Hébrides... ce que dit clairement et en toute simplicité le titre original – The Singing Sands – qui a par ailleurs le mérite de laisser entrevoir un peu de la singularité du récit dont on se demande longtemps s'il va ou non prendre une orientation véritablement policière.

Certes, le cadavre est là dès le début. Étendu sur sa couchette du compartiment B7, bien froid dans son immobilité aux faux airs de léthargie éthylique. Entraperçu qui plus est par un inspecteur de Scotland Yard sur le point de quitter le wagon – Alan Grant, venu pêcher à Clune, d'où il est originaire, pour se guérir d'un surmenage qui le plie aux dures lois d'une claustrophobie aiguë. Le corps est rapidement examiné – identification, cause apparente de la mort – et certains détails s'inscrivent dans l'esprit d'Alan Grant pour, ensuite, monopoliser sa réflexion le temps qu'il prend son petit déjeuner en attendant que son ami Tommy, chez qui il doit séjourner, vienne le chercher. Le visage du mort – celui d'un jeune homme aux cheveux noirs ébouriffés et aux sourcils téméraires. Une poignée de vers tracés d'une écriture presque enfantine sur une page de journal – un journal que Grant a empoché inconsciemment alors qu'il était dans le compartiment B7. Dans ces vers, les bêtes parlent, les pierres marchent, et le sable chante.

Grant a beau être bercé par l'atmosphère chaleureuse qui règne chez ses hôtes, B7 revient le hanter. Tout en se laissant oublier. Le lecteur comme l'inspecteur est bercé, il perd un peu de vue B7, et le roman glisse vers le récit intimiste oscillant entre souvenirs d'enfance et lutte menée contre les accès de panique claustrophobe. De savoureux portraits sont brossés, et se déguste à la petite cuillère une ironie cinglante qui épingle aussi bien le nationalisme écossais que les fantasmes touristiques suscités par les Hébrides ou les idées toutes faites que les étrangers nourrissent à l'égard de l'aristocratie britannique. Juste pour le plaisir, citons cette définition de la Grande-Bretagne vue par Grant : Un endroit très banal, boueux et routinier pour un pays qui avait changé l'histoire du monde.
Jusqu'à ce que survienne Tad Cullen, un pilote américain à la recherche de son ami Bill Kenrick et par qui reflueront des parfums d'Arabie...

Grâce au talent d'architecte de Josephine Tey, le lecteur subit la même attraction, lente, insidieuse et presque intangible, pour le mystérieux mort du compartiment B7 qu'Alan Grant. Le grand art de la romancière est de conserver intact cet intérêt pour un cadavre énigmatique alors qu'elle feint de l'enfouir sous diverses couches narratives dont il n'émerge que de temps à autre, au gré des accès obsessionnels du héros, et ce jusqu'à cette phase proprement policière, où l'on exploite tous les indices, procède aux interrogatoires, examine les empreintes digitales, suit la piste de bagages dont on soupçonne à peine l'existence... qui est tout entière ramassée dans le dernier tiers du récit. C'est, dès lors, un concentré savamment dosé, où l'on goûte le piment de l'exotisme, du mythe oriental et des stratagèmes parfois aventureux mis en œuvre pour confondre le coupable.
La force de ce roman, outre sa construction magnifiquement habile, tient à ce ton singulier qui ironise et mord en banalisant, sans lequel on ne suivrait peut-être pas l'inspecteur Grant jusqu'au bout de ses investigations – car la pêche à la mouche dans les eaux de la Turlie, si elle a des vertus apaisantes pour qui souffre de surmenage, peut aussi décourager un amateur de polars appréciant les enquêtes démarrant au quart de tour et ne suivant plus que méandres avant de s'achever en coups de théâtre successifs...

NB - The Singing Sands a été publié à titre posthume - le manuscrit a été trouvé dans les papiers de l'auteur après sa mort. La première traduction française est celle de Pascal Aubin pour les éditions du Masque, sortie en 1998. Le roman n'a manifestement pas été réédité depuis et ne semble désormais disponible que sur le marché de l'occasion, à des prix variant de 3 à 7 € environ.

Citation

– Vous voulez dire que vous êtes Scotland Yard ?
– Pas dans son entier. Un de ses étais mineurs. Étai au sens de soutien.

Rédacteur: Isabelle Roche mardi 29 décembre 2009
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