La Petite fille que j'ai tuée

Lorsque le hibou est parti, je me suis assise dehors et j'ai regardé la rivière noire devant notre maison, puis j'ai vu une longue file de mulots, de morts qui marchaient.
Amanda Coetzee - Rédemption
Couverture du livre coup de coeur

Coup de coeur

Éclipse totale
Harry Hole a été exclus de la police, ce qui ne l'empêche pas de couler des jours heureux, bouteille ...
... En savoir plus

Identifiez-vous

Inscription
Mot de passe perdu ?

jeudi 25 avril

Contenu

Roman - Noir

La Petite fille que j'ai tuée

Hard boiled - Disparition - Complot MAJ jeudi 29 août 2019

Note accordée au livre: 4 sur 5

Grand format
Inédit

Tout public

Prix: 18 €

Ryô Hara
Watashi ga koroshita shôjo - 1989
Traduit du japonais par Dominique Sylvain, Frank Sylvain, Saeko Takahashi
Paris : Atelier Akatombo, juin 2019
378 p. ; 21 x 15 cm
ISBN 978-2-37927-036-9
Coll. "Policier"

Des Makabe sur les bras

Lorsque le détective privé Sawazaki de l'agence Watanabe accepte de rencontrer Osamu Makabe, il ne s'imagine pas qu'il va devoir mener une enquête hard boiled qui accentuera son côté misanthrope. L'histoire est classique et digne d'un roman américain : une jeune fille, violoniste émérite, a été enlevée alors qu'elle se rendait chez son professeur, et les ravisseurs demandent une rançon de soixante millions de yens. Le truc déplaisant c'est qu'ils tiennent expressément à ce que Sawazaki leur délivre cette rançon dans une mallette rouge. Le détective, qui a déjà eu par le passé des démêlés avec les différentes polices de Tokyo, se retrouve donc embarqué dans une histoire dont il ne connait ni les tenants, ni les aboutissants. Surtout, il est d'emblée condamné à être réactif plutôt qu'actif. C'est ainsi que les ravisseurs, qui le contactent par téléphone (le roman date de 1989, autant dire qu'il se déroule à l'âge de la Préhistoire des nouvelles technologies), le trimballent de café en café à bord de sa Bluebird jusqu'à ce qu'un événement forcément impondérable vienne le perturber : deux motards qui discutent au téléphone du dernier endroit où il attend en vain sa communication. Un règlement de compte s'ensuit qui se conclue d'un K-O technique (un peu illicite), et voilà l'argent de la rançon envolé. Plus tard, le cadavre de la jeune fille sera retrouvé dans les restes d'une maison de retraite. Et Sawazaki devra assumer le poids de son échec. C'est peut-être la raison qui le poussera à accepter une autre mission (s'assurer l'innocence de certaines personnes), et qu'il verra comme sa propre rédemption le fait de découvrir l'identité des ravisseurs-meurtriers. Il y a bien entendu du Philip Marlowe dans ce personnage de détective privé japonais à fleur de peau qui se retrouve embarqué dans une enquête complexe. Il ne fait rien pour améliorer ses rapports conflictuels avec la police. Il joue de plus un jeu dangereux avec les yakuzas. Surtout il s'escrime à mettre un peu d'ordre dans un monde qui l'effraie. Mais le plus intéressant est la confrontation entre le personnage archétypal à l'américaine et son adaptation japonaise. Car, et c'est une lapalissade, se conjuguent deux cultures diamétralement opposées (une ancestrale et une très contemporaine et plutôt hybride). C'est ainsi que certaines personnes mises devant des évidences font dignement amende honorable. Le lecteur baigne dans une atmosphère faite de faux semblants, et croise des personnages qui ont un souci permanent de maintenir les apparences (avec un rapport surprenant à l'argent et à la famille), et qui portent sur leur dos un poids ancestral (y compris chez ceux qui devraient en être exempté). Avec ce personnage aux deux cultures de Sawazaki, Ryô Hara tient un modèle de détective hard boiled nostalgique, voire mélancolique.

Citation

Menotté à un siège dans un cinéma désaffecté, j'observai avec inquiétude les plaques de plâtre menaçant de tomber du plafond. L'une d'elles se détacha mais, par chance, ne m'atterrit pas sur la tête. Je ne pouvais pas espérer qu'on alerterait un employé du cinéma pour qu'il me libère ; ici, à part moi, il n'y avait pas ombre qui vive. Sur l'écran de guingois, une scène se répétait à l'infini. Elle montrait un homme bavardant dans une voiture avant d'être visé par un tireur d'élite et de s'écrouler. En fait, c'était moi qui m'étais écroulé. Et des gens m'appelaient par mon nom.

Rédacteur: Julien Védrenne jeudi 29 août 2019
partager : Publier dans Facebook ! | Publier dans
MySpace ! |

Pied de page