Fallait pas...

Mila est déçue, que croyait-elle ? Que le représentant de leur peuple effectuait sa visite quinzomadaire à son bon ami Cocco ? Qu'un lundi sur deux, il prenait sa pirogue pour ne pas rater la correspondance de 8 h 45 sur les berges de l'Orénoque ? Mais si l'indien n'est pas là, qu'avait Horacio en tête lorsqu'il leur avait proposé cette rencontre ? Il doit avoir un moyen de communiquer avec les Amazoniens. Par téléphone satellitaire ?
Isabelle Bourdial - Chasseur d'esprit
Couverture du livre coup de coeur

Coup de coeur

Éclipse totale
Harry Hole a été exclus de la police, ce qui ne l'empêche pas de couler des jours heureux, bouteille ...
... En savoir plus

Identifiez-vous

Inscription
Mot de passe perdu ?

mardi 16 avril

Contenu

Roman - Policier

Fallait pas...

Vengeance - Drogue - Urbain MAJ lundi 24 avril 2017

Note accordée au livre: 3 sur 5

Grand format
Inédit

Tout public

Prix: 18 €

Olivier Maurel
Paris : Lajouanie, décembre 2016
246 p. ; 19 x 13 cm
ISBN 978-2-37047-077-5
Coll. "Roman policier, mais pas que"

La vengeance est un plat...

Dans Au-dessus des horizons verticaux, le commissaire Zac Bechler était alcoolique et un tantinet suicidaire dans ses interventions. Dans Fallait pas... sa guérison semble en bonne voie (si tant est que l'on puisse guérir de l'alcoolisme... disons qu'il se soigne), et son quotidien plus équilibré. Bien sûr, il travaille toujours beaucoup, et toujours avec son collègue Franck Thibault, mais en ayant retrouvé une vie de famille. Pas de femme, mais sa fille qui a repris goût à la vie et, ensemble, ils forment une sacrée équipe de rescapés bien décidés à en profiter le plus possible. C'est alors que lui tombe sur le paletot une affaire vieille de quinze ans. Quinze ans c'est le temps qu'il a fallu à Stan Da Silva, capitaine à la brigade des stup', pour sortir du coma. En effet dans la nuit du 24 au 25 décembre 1999, le fringant poulet s'était fait sauvagement attaquer, et son agresseur s'était amusé à le rendre paraplégique. Apparemment parce qu'il enquêtait de trop près sur un gros bonnet de la drogue. D'ailleurs, le lendemain, le coéquipier de Da Silva disparaissait alors qu'il effectuait son jogging. On ne retrouva jamais son corps. Juste une trace de sang. Bref, quinze ans plus tard, Da Silva se réveille paralysé, redécouvre son épouse, une bombasse prénommée Marie (qui, coup de bol, est toubib) qui l'a attendu pendant toutes ces années, et qui est bien décidé à s'occuper de lui. Elle est pas rancunière la dadame, car du temps de sa splendeur, le flicard se foutait bien de sa gueule. Il prétextait des planques et des filatures pour la laisser dormir seule à la maison tandis qu'il partait pour des nuits de folie pendant lesquelles il s'envoyait des putes, des pétasses, des jeunes, des vieilles, des grosses, des maigres, avec de la coke plein son pif et du cognac plein son gosier. Dans le passé, l'était pas particulièrement fidèle Da Silva. Pas particulièrement droit dans ses bottes, le capitaine. Dans le passé... Un passé qui est resté lui aussi dans le coma pendant quinze ans. Et à l'instar de Da Silva, un passé qui vient de se réveiller.
Ce que j'aime avec les romans de Olivier Maurel, et particulièrement dans celui-là, c'est qu'il n'y a pas de personnages neutres. On pourrait même dire que, suivant un thème cher à Jean-Pierre Melville, tous les personnages sont coupables. Et ceux qui ne le sont pas sciemment, le sont inconsciemment (fatalement), ou à l'insu de leur plein grès (particularité qui là, pour le coup, j'en conviens, les fait sortir des limites du Cercle rouge où tout le monde se sait coupable). L'auteur aime multiplier les dommages collatéraux. Dès qu'un personnage fait, ou ne fait pas, quelque chose, son action/inaction ne reste jamais impunie. Automatiquement, il y a sanction. Cela permet de jouer sur deux notes : celle de la responsabilité désamorcée (on ne peut pas se sentir responsable de quelque chose que l'on a involontairement provoqué), et, a contrario, celle d'une culpabilité quelques fois justifiée, souvent exagérée. Car c'est là que Olivier Maurel fait son distinguo entre les bons et les mauvais, un classement à trois étages : les horribles, les repentis, les réglos. Ce n'est pas une question d'insigne ou de franchissement des frontières de la loi, c'est une question de conscience. Chez Olivier Maurel, il y a des personnages que les crimes atroces qu'ils ont commis n'empêcheront jamais de dormir, puis il y a ceux qui ont été des dégueulasses et qui le regrettent, et enfin ceux qui ne se sont pas vautrés dans la cruauté, loin de là, mais qui ont foiré des trucs dans leur vie, des trucs pro, des trucs perso et qui se le font payer parce que ça a engendré des souffrances chez leurs proches (dommages collatéraux toujours) et que ça leur est insupportable d'avoir fait du mal à quelqu'un qu'ils aiment. Pour Olivier Maurel, ceux-là sont les vrais héros, et Bechler est leur digne représentant. En plus d'affronter la vie (et quand on est flic, affronter la vie, ça peut aussi vouloir dire affronter les pires horreurs), ils doivent apprendre à s'accepter, à se supporter, à s'aimer... au moins un peu. Autre constance chez Olivier Maurel : la violence sans fard. Fallait pas... contient son petit lot de récits de crimes abjects, immondes, d'une cruauté inouïe. Il y a des amateurs pour ça, moi, je n'en raffole pas. Mais je ne vais pas faire mon puritain. Il faut le respecter car ça fait partie de l'univers de l'auteur qui, de par sa profession (directeur d'établissements pénitenciers), en a certainement vu des pires et des moins racontables. En tout cas, à mes yeux, ça lui donne une légitimité et une vérité (surtout dans le cadre pénitencier). Et comme je le soupçonne d'être un monsieur intelligent, je pense qu'il sait parfaitement utiliser l'horreur pour renforcer le sentiment de malaise qu'il cherche à faire ressentir à ses lecteurs. Heu... là, dans le final de Fallait pas... ça marche du tonnerre ! Brrrr.

Citation

Comme elle le lui avait promis, Marie Da Silva fit sortir son mari de l'hôpital le 1er juillet. Elle l'installa dans un lit médicalisé judicieusement positionné dans une chambre au premier étage de leur villa. De là, il avait une vue dégagée sur le jardin et la piscine. Elle pensait bien faire... mais pour Da Silva, rien ne serait plus jamais comme avant et cette évidence le rongeait. Voir la vie au-dehors, allongé, paralysé, était une torture… une putain de torture.

Rédacteur: François Legay lundi 24 avril 2017
partager : Publier dans Facebook ! | Publier dans
MySpace ! |

Pied de page