Retour à Marseille

C'est comme si on était entrés dans le coffre d'une banque et qu'on n'ait fait que toucher les lingots d'or du bout des doigts avant de ressortir sans en emporter aucun, simplement contents de réaliser un tour de force.
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jeudi 28 mars

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Roman - Noir

Retour à Marseille

Urbain - Faits divers MAJ lundi 18 avril 2016

Note accordée au livre: 4 sur 5

Grand format
Inédit

Tout public

Prix: 16,9 €

Gérard Bon
Paris : La Manufacture de livres, février 2016
208 p. ; 21 x 15 cm
ISBN 978-2-35887-117-4

Vue en coupe réglée d'une ville

Malgré son inscription comme Ville européenne de la culture et la création du MUCEM, Marseille continue à souffrir d'un déficit d'image et lorsqu'elle occupe le devant de l'actualité, c'est souvent pour ses réglements de compte. Les règlements de compte, c'est aussi ce dont s'occcupait Antoine, un ancien policier qui avait repris en charge une vieille enquête, l'un des faits divers les plus violents de la ville pour écrire un livre. Mais il a été lui-même abattu et son éditeur demande au narrateur, journaliste, de reprendre l'histoire et de démêler les fils de cette sombre affaire. Le journaliste est un homme un peu perdu toujours entre deux femmes, entre deux cuites, entre deux envies d'arrêter de boire. Il a quitté Marseille il y a des années et son retour est un peu confus. Il doit en même temps jongler avec ses obsessions, avec son passé et le passé de la ville, avec une vérité qui ne cesse de fuir. Au départ, il s'agit d'un faits divers sanglant, qui rappellera aux plus anciens les gros titres des journaux : la tuerie du Bar du Téléphone (rebaptisé Bar de la Poste dans ce roman noir de Gérard Bon) ou "Massacre de la Saint Gérard" (Bon) en pleine journée. Une dizaine de personnes trouvent la mort en ce jour du 3 octobre 1978. De nombreuses questions se posent. L'un des morts était-il visé plus particulièrement ? Quel mobile ? L'un des tueurs, peut-être identifié, a disparu quelques jours après le drame et personne ne l'a plus jamais revu. Bizarrement, chaque fois qu'une piste semblait se lever, un témoin, un vieux protagoniste de l'affaire mourrait ou était victime d'un accident. Cela bien entendu n'épargnera même pas l'éditeur du futur livre, ni l'un des anciens parrains de la ville totalement effrayé à l'idée des remous suscités par le narrateur.
Entre deux allers-retours sur Marseille, une description de la ville, qui rappelle les éléments historiques, de la sociologie, des affaires diverses, de manière extrêmement bien insérés dans le texte, Gérard Bon évoque un personnage un peu à la ramasse se cherchant dans une ville qui se cherche aussi. On a le sentiment d'une ville labyrinthique, où les forces de police s'opposent, où l'on ne sait jamais si un tel est policier, truand, indic protégé par la police, ou membre d'une officine douteuse en liaison avec le pouvoir, où chaque phrase ne dit ni une vérité, ni un mensonge, mais un entre-deux gris impossible à définir. Le narrateur cherche l'amour avec un grand "A", mais il ne se lie qu'avec des amours de passage, dont il sait pertinemment qu'elles ne déboucheront sur rien, quittant un bar pour entrer en cure de désintoxication et quittant le centre pour rencontrer une femme qui apprécie la dive bouteille. Le narrateur et son entourage sont à l'image de ces pistes qui n'aboutissent pas, de ces rendez-vous où les témoins parlent mais ne disent rien, où un simple scooter qui passe peut être l'occasion de votre mort, où vous n'êtes pas tranquille y compris agonisant d'un cancer, au fond d'un lit d'hôpital : complexes et emplis de contradictions. Bref, dans cette vie qui grouille et s'agite, cette vie qui ressemble à la ville de Marseille : intense, rapide, agréable et sans doute absurde. Gérard Bon a peut-être lui compris l'incompréhensible.

Citation

C'est drôle, mais chaque fois que je pense à Marseille, c'est un bar à marins, situé au bout du port de commerce que je vois. Un bouge antillais, enfumé et cradingue à souhait.

Rédacteur: Laurent Greusard lundi 18 avril 2016
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