Femmes bourreaux, femmes victimes

L'inspecteur Millecamps [...] imaginait de quelle manière il utiliserait les millions d'euros qu'il empocherait s'il gagnait dimanche au concours de pronostics sportifs.
Emmanuel Sys - Julia, morte deux fois
Couverture du livre coup de coeur

Coup de coeur

Éclipse totale
Harry Hole a été exclus de la police, ce qui ne l'empêche pas de couler des jours heureux, bouteille ...
... En savoir plus

Identifiez-vous

Inscription
Mot de passe perdu ?

samedi 20 avril

Contenu

Essai - Policier

Femmes bourreaux, femmes victimes

Procédure - Faits divers MAJ jeudi 05 mars 2015

Note accordée au livre: 2 sur 5

Grand format
Inédit

Tout public

Prix: 14,95 €

Dominique Hoflack
Paris : Le Moment, mars 2015
150 p. ; 21 x 14 cm
ISBN 978-2-35417-369-2

Robes de justice

Étrange texte que cet essai qui s'apparente plus à un plaidoyer, une justification de la justice, qu'à un recueil d'affaires judiciaires. Dominique Hoflack, l'auteur, est avocat général depuis plus de trente ans. Lors des cours d'assises, le procureur représente l'État, appuie l'accusation des avocats des victimes et propose les peines. "Issue d'une lignée d'avocats et de magistrats", elle est la fille de Georges Hoflack qui fut président de la cour d'assises de Constantine et qui connaissait bien l'affaire Chambige qui ouvre le livre après un extrait du meurtre de L'Étranger d'Albert Camus.
En 1888, Henri Chambige, garçon de vingt-deux ans, se fait conduire en fiacre dans une maison où il s'enferme avec Magdeleine jeune femme de sa connaissance, de dix ans son aînée et mère de deux enfants. Elle sera retrouvée tuée de plusieurs balles dans la tempe, lui, prostré et blessé. Werther s'est-il raté ? A-t-elle été hypnotisée ? Le procès doit trancher : soit un double suicide consenti, soit un meurtre passionnel. La victime était-elle aussi le bourreau de son cœur ? À noter que cette affaire jugée à Constantine a visiblement inspirée Jean Contrucci pour son "Mystère de Marseille", La Somnambule de la Villa aux Loups.
Il semble que, pour Dominique Hoflack, cette histoire, intitulée "Magdeleine, l'égérie littéraire", contienne la quintessence de la position de la femme au sein du crime. Mais, pour le lecteur, sans doute moins littéraire d'inspiration, sa présence ici est loin d'être évidente car si les récits suivants concernent aussi des femmes victimes de viols et de meurtre, ils sont datés des années 2010. Quelques unes ont été agissantes en premier lieu : l'une aide son ami SDF à tuer un homosexuel, l'autre monte le meurtre de son mari avec son amant, l'une tue son amant et accuse sa femme, l'autre accouche dans des toilettes et étrangle son bébé, la dernière tire sur une fourgonnette qu'elle croyait occupée par l'ex-petit ami gitan de sa fille de quatorze ans. Des affaires de tous les jours.
Pour respecter le secret professionnel, l'auteur débaptise les acteurs et leur donne un nouveau prénom imprimé en italiques. Ces prénoms de femmes, y compris celui de Magdeleine, reviendront en boucle au fil des chapitres (c'est la Magdeleine de Proust) pour accompagner le style étonnant de l'auteur ni emphatique ni judiciaire, ni psy ni revanchard, mais sans doute un peu de tout ça à la fois ; sorte de plaidoirie littéraire pour une fonction difficile faisant partie de la Justice inévitable dans notre monde de brutes. Dans son dernier chapitre "Accusés, levez-vous !", Dominique Hoflack écrit : "Psychiatres, psychologues, juges, procureurs, enquêteurs ; nous sommes tous impuissants face à la montée de la violence, sous toutes ses formes. Soigner, encadrer ou punir ou fustiger ? Les limites sont partout, et nos interventions pour maintenir l'équilibre social ne peuvent que se heurter à l'humain dans toute sa complexité."
En conclusion, voilà un livre étonnant dont la couverture entre bien dans les codes du récit judiciaire avec son titre aguicheur et sa photo très service-service. Mais le style s'éloigne de ces codes pour un récit mi-figue, mi-raisin, naviguant entre dénonciation et justification.

Citation

Oui, les bourreaux existent. Ceux qui fustigent les autres de leurs différences. Ceux qui, instinctivement, perçoivent les faiblesses de ceux qu'ils côtoient. Comme s'ils intégraient, d'emblée, la notion de proie facile, quand elle passe à proximité immédiate de leur territoire.

Rédacteur: Michel Amelin jeudi 05 mars 2015
partager : Publier dans Facebook ! | Publier dans
MySpace ! |

Pied de page