Le Septième fils

Une vraie bête de cirque, voilà ce que j'étais, et mes meilleurs amis soupçonnaient l'homme que j'aimais d'être un tueur de phénomènes.
Brigitte Aubert - Mémoires secrets d'un valet de cœur
Couverture du livre coup de coeur

Coup de coeur

Éclipse totale
Harry Hole a été exclus de la police, ce qui ne l'empêche pas de couler des jours heureux, bouteille ...
... En savoir plus

Identifiez-vous

Inscription
Mot de passe perdu ?

vendredi 19 avril

Contenu

Roman - Policier

Le Septième fils

Énigme - Drogue - Finance MAJ vendredi 24 janvier 2014

Note accordée au livre: 5 sur 5

Poche
Réédition

Tout public

Prix: 7,9 €

Árni Thórarinsson
Sjöundi sonurinn - 2008
Traduit de l'islandais par Éric Boury
Paris : Points, novembre 2011
446 p. ; 18 x 11 cm
ISBN 978-2-7578-2506-8
Coll. "Policier", 2726

Travers de la mondialisation

Árni Thórarinsson est (pour l'instant du moins) moins connu dans notre pays que son compatriote Arnaldur Indridasson. Pourtant, il n'est pas en reste avec lui quant à la qualité littéraire. Il a même l'avantage de nous en dire un peu plus encore sur un pays, l'Islande, dont les Français ont récemment entendu parler (faute de pouvoir le situer sur la carte) lorsque l'un de ses nombreux volcans les a stupidement empêchés de partir en voyage ou d'en revenir (sans compter une retentissante banqueroute nationale peu auparavant). Il a choisi un journaliste prénommé Einar afin d'explorer pour nous l'île sous toutes les coutures. Le tour d'Islande qu'il a organisé à son intention l'amène cette fois dans le véritable trou de balle du pays, la petite localité d'Isafjörđur qu'il vous faudra une carte détaillée et une bonne paire de lunettes pour dénicher, à l'extrême pointe nord-ouest, où elle jouit d'un remarquable isolement, tant du fait de sa situation que de la physionomie du terrain.
Il s'en passe pourtant des choses, dans ce coin "où il n'arrive jamais rien", resté à l'écart du monde et de ses folies pendant un bon millénaire. Jugez un peu : un incendie ravage la demeure "historique" (enfin, à l'échelle du pays) d'un couple en vue, un camping-car lituanien (eh oui, pourquoi pas ?) est volé et retrouvé carbonisé avec, à l'intérieur, deux cadavres qui seront identifiés comme ceux d'une vedette du football un peu sur le retour et de son ami (en affaires, mais peut-être plus si affinités). Cela brûle d'ailleurs un peu partout, dans le pays, ces dernières années, ainsi qu'Einar est bien placé pour le savoir, journaliste qu'il est. Ajoutons que quelqu'un a déféqué sur la tombe du vénérable grand-père du propriétaire de la maison en question, qu'un député est retrouvé noyé (après s'être au préalable fait briser les vertèbres cervicales, ce qui ne figure pourtant pas parmi les coutumes locales de cet étrange pays), une chanteuse qui a failli être couronnée lors d'un concours télévisé et se prend un peu trop au sérieux, quelques jeunes en révolte à la mode "gothique", un peu de drogue (forcément, c'est la moindre des choses quand on prétend à la modernité) et des affaires un peu louches comme il se doit, et vous voyez qu'on n'a guère à envier au reste du monde, à Isafjörđur, en matière de criminalité et de débilité.
On s'en voudrait bien sûr de révéler le fin mot de l'histoire. Sachez seulement qu'il fait intervenir une odeur de pétrole, des filiales de filiales de filiales... une menace informatique venant de manvamp@hotmail.com, la magie du chiffre sept, des abus sexuels sur des personnes des deux sexes (parité oblige) et une dose de poésie et de légendes. Éclairant, non ? Une chose certaine : l'intrigue est subtile, bien ficelée et littéraire. L'avantage d'avoir recours à un enquêteur journaliste et non simple flic est qu'on peut s'évader des données strictement policières et prendre en considération tout un tas de faits, y compris de nature culturelle, c'est dire. De toute façon, maintenant que les genres littéraires ont été totalement privatisés, comme le reste, les meilleurs romans policiers ne sont-ils pas ceux qui se donnent le moins pour tels ? La marque particulière de Thórarinsson, c'est une douce ironie qui vise la façon qu'ont ses compatriotes, selon lui, d'adopter tous les travers de la civilisation "mondialisée" et de vouloir à tout prix accéder à la "modernité", impératif catégorique des temps actuels qui, dans ce contexte, prend parfois des aspects encore plus grotesques qu'ailleurs. Bref, le snobisme (qu'il soit vestimentaire ou "sociétal" comme on dit maintenant), l'hypocrisie et autres formes du "mensonge vital" jadis cher à Ibsen en prennent pour leur grade au moyen de toute une gamme de procédés allant de la satire au sarcasme, en passant par l'ironie et l'humour pur et simple. L'écriture de Thórarinsson s'améliore de volume en volume, contrairement à une habitude trop courante dans ce secteur littéraire, et celui-ci (au demeurant bien traduit, ce qui ne gâte rien) est un réel plaisir de lecture, passionnant et instructif à la fois. Voila de bonnes raisons pour qu'il soit passé sous silence par les médias.

Citation

Les Islandais passent leur temps à penser à l'argent. Surtout quand il s'agit de grosses sommes qu'ils voudraient voir atterrir dans leur poche plutôt que dans celle du voisin.

Rédacteur: Philippe Bouquet vendredi 27 décembre 2013
partager : Publier dans Facebook ! | Publier dans
MySpace ! |

Pied de page