Libyan Exodus

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vendredi 29 mars

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Roman - Noir

Libyan Exodus

Huis-clos - Road Movie - Guerre MAJ mercredi 17 juillet 2013

Note accordée au livre: 4 sur 5

Poche
Inédit

Tout public

Prix: 8,65 €

Tito Topin
Paris : Rivages, juin 2013
220 p. ; 17 x 11 cm
ISBN 978-2-7436-2580-1
Coll. "Noir", 922

Odyssée titonesque

Libyan Exodus, c'est une version moderne et libyenne de "Boule de suif", la nouvelle de Guy de Maupassant qui relate la fuite de dix personnes en calèche depuis Dieppe, occupé par les Prussiens pendant la guerre de 1870. Tous les éléments y sont réunis à travers une fuite en forme de desert movie qui n'est pas non plus sans rappeler, influences cinématographiques de l'auteur, Tito Topin, obligent, Un taxi pour Tobrouk. Et pas seulement parce que Tobrouk est une ville de la côte libyenne et que le rapprochement est aisé, pas seulement parce qu'un des protagonistes se nomme Ventura (un autre a pour nom Hitchcock !), mais parce que pour ceux qui ont vu le film de Denys de la Patellière, l'avion aura une incidence finale non négligeable.
Mais avant une fin funeste et prévisible, Tito Topin aura renoué avec une veine romanesque qui va puiser du XIXe à la première moitié du XXe pour son aspect aventureux à la Pierre McOrlan. Dans son roman très structuré, qui alterne narration chronologique de l'aventure collective et passage en revue introspectif de chacun des acteurs du drame qui se joue sous nos yeux, Tito Topin crée à l'intérieur d'un Land-Cruiser une atmosphère oppressante avec un panel de personnages qui sous des identités vraies ou fausses ont beaucoup en commun. Tous fuient un conflit meurtrier en plein Printemps arabe. Tous ont une raison évidente de fuir. Parfois misérable, lâche ou veule, parfois parce que lorsque la bête immonde s'abat sur vous, c'est juste une question de survie. Parce qu'ils se connaissent sans vraiment se connaître, des liens haineux s'installent - chacun connait un pan de l'histoire d'un autre voyageur sans appréhender justement le contexte. Tous ont une haine entre eux parce que d'abord ils se haïssent eux-mêmes suite à quelque chose qu'ils ont ou pas fait, et qui les renvoie à leur petite survie mesquine.
Les seuls à véritablement prendre les choses autrement sont Salima et Henri. Salima, une saltimbanque qui a fini par coucher avec la Pourriture dans l'espoir de la tuer, Henri, un aviateur français abattu en vol, dont la femme veut le quitter pour son meilleur ami, et qui a échappé à un lynchage urbain en règle grâce à l'aide de Chino, le chauffeur, qui sera le premier à mourir sous la torture lors de leur seule et unique halte, où ils logent dans un hôtel en ruine alors qu'un officier aux ordres du pouvoir attend d'envoyer ses troupes au front et souhaite que Salime monte dans sa chambre d'hôtel, la seule digne de ce nom.
Dans la nouvelle de Guy de Maupassant, chacun met la pression sur Boule de Suif pour qu'elle accepte la proposition indécente d'un officier prussien omnipotent, qu'ils jugent à raison responsable du fait qu'ils ne peuvent repartir. Mais Selima prévient : si elle couche avec l'officier, alors elle choisira qui repartira le lendemain avec elle. Elle n'est pas Boule de Suif, elle ne se laissera ni faire, ni attendrir par des personnes qui sont toutes à au moins un titre méprisables. C'est le premier écart qu'accorde Tito Topin à son épopée tragique. Son officier libyen est peut-être le plus humain de l'hôtel. Lui est un militaire qui ne se pose pas trop de questions et obéit aux ordres. Il a rendez-vous avec un destin funeste et le sait parfaitement. Ses motivations pour faire monter Selima ne sont pas celles que l'on croit. Cela n'excuse en rien les tortures que par son silence il a cautionné.
Le refus initial de Selima de le rencontrer scellera le sort de tous. Tous qui ont à voir d'une manière ou une autre avec la Pourriture, Mouammar Kadhafi, le dictateur dont le nom ne sera prononcé pour la première fois qu'à la 167e page de ce très bon court roman caustique et enlevé.

Citation

Je vous laisse, je vais me reposer, c'est fou comme le sentimentalisme prend des proportions ridicules dans un pays en guerre, comme s'il fallait se dépêcher de s'aimer avant de mourir.

Rédacteur: Julien Védrenne mardi 16 juillet 2013
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