Transes

C'est un grave travers de notre caractère, de notre tempérament slave. Nous souffrons d'une noirceur de l'âme et nous tombons amoureux de notre malheur.
Alan Furst - Les Soldats de la nuit
Couverture du livre coup de coeur

Coup de coeur

Éclipse totale
Harry Hole a été exclus de la police, ce qui ne l'empêche pas de couler des jours heureux, bouteille ...
... En savoir plus

Identifiez-vous

Inscription
Mot de passe perdu ?

jeudi 18 avril

Contenu

Roman - Noir

Transes

Terrorisme MAJ jeudi 17 mai 2012

Note accordée au livre: 5 sur 5

Grand format
Inédit

Tout public

Prix: 22,3 €

Christopher Sorrentino
Trance - 2005
Traduit de l'anglais (États-Unis) par Clément Baude
Paris : Sonatine, avril 2012
752 p. ; 21 x 15 cm
ISBN 978-2-35584-087-6

Désendoctrinement marketing

Pour nous Européens, le terrorisme comme arme politique des minorités s'est développé dans les années 1970 avec Action Directe (qui continue de temps à autre à se signaler par d'éventuelles remises en liberté), les groupuscules italiens (la cabale et la cavale de Cesare Battisti les ont remis au goût du jour) ou la bande à Baader, dans un mélange folklorique de violence et de glamour che guevariste. Au même moment, les États-Unis ont connu eux aussi leurs mouvements, comme The Weathermen et l'Armée Symbionaise de Libération (ALS). Cette dernière s'est fait surtout connaitre à travers l'enlèvement et le retournement de Patricia Hearst, jeune femme des milieux riches devenus passionaria gauchiste. Christopher Sorrentino s'inspire fortement de ce dernier groupe pour écrire avec Transes un roman complexe, multivocal et captivant. Hors de question pour lui de présenter les personnages dans leurs motivations psychologiques et sur le retournement de la jeune femme, mais c'est l'occasion de présenter toute l'époque avec ses contradictions et ses rêves. Ceux qui chercheraient une histoire pleine de fureur, de morts, de longues diatribes idéologiques se tromperaient lourdement.

Christopher Sorrentino, en se concentrant sur le groupe, mais en sachant ouvrir sur des personnages secondaires, montre avec beaucoup d'humour la situation. Le groupe passe un temps fou à chercher un éditeur pour publier son livre sur la révolution. Ses membres sont présentés y compris dans leur naïveté - les révolutionnaires se réfugient chez des gens qui doivent les aider obligatoirement puisqu'ils sont le peuple et qu'eux défendent le peuple... Transes malgré le nombre conséquent de ses pages et le peu d'action qui s'y inscrit est captivant de bout en bout dans sa description fine et réaliste du quotidien d'un groupe radical qui peu à peu s'enfonce dans la désillusion, ne sait comment s'en sortir, où parfois les terroristes se réfugient dans les jupes de leur maman pour échapper à la police.

Entre ce souci du détail, porté par une construction romanesque très rigoureuse, cette ironie qui jamais ne se moque (c'est sans doute cette raison qui explique la façon dont Christopher Sorrentino évite les lourdeurs idéologiques), Transes montre comment, face à l'incurie des politiques traditionnels, la réponse violente des jeunes générations éduquées annonce outre leur propre disparition (comme dans la description de Jean-Patrick Manchette des Deux mâchoires du même piège) la montée d'une société du spectacle. Il n'est sans doute pas innocent de voir le roman s'achever sur la demande de la mère d'une terroriste arrêtée afin qu'elle aille au salon de beauté de la prison. Le roman montre, ainsi en creux, comment l'Occident a perdu dans ces années-là les espoirs que développait sa jeunesse, comment il a transformé les idéaux en valeurs marchandes, comment il a réussi à convaincre qu'il valait mieux acheter un tee-shirt du Che que d'essayer de pratiquer la révolution guevariste.

Citation

Pouvez-vous nous donner votre réaction, s'il vous plait, pouvez-vous abandonner cette posture raide de dignité solennelle, pouvez-vous nous donner quelque chose de brut, à la manière de l'os répondant au couteau qui découpe la chair, quelque chose qu'on puisse montrer aux gens ?

Rédacteur: Laurent Greusard vendredi 27 avril 2012
partager : Publier dans Facebook ! | Publier dans
MySpace ! |

Pied de page