Dernier refrain à Ispahan

Ils ont donc encore gagné sur le dos des éprouvés, comme au tout premier temps à Olduvaï, toutes ces vies négligées, ces corps évaporés sous l'excuse de la survie de l'humanité, cette élite qui reste seule, hilare et goinfrée de cette suffisance qui fait les gagnants de toutes les guerres.
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Roman - Noir

Dernier refrain à Ispahan

Politique - Social - Drogue MAJ vendredi 02 mars 2012

Note accordée au livre: 4 sur 5

Grand format
Inédit



Prix: 15,3 €

Naïri Nahapetian
Paris : Liana Levi, février 2012
212 p. ; 21 x 14 cm
ISBN 978-2-86746-587-1
Coll. "Policier"

Chanteuses en dérive

"Dans un royaume où les ignorants sont rois, un homme a volé la voix des femmes. Il a emporté leur chant, semé des tulipes sur leur chemin ; et la joie s'en est allée." Ces paroles d'une chanson de Roxana résonne de façon prophétique tout au long de l'enquête de Narek, le journaliste franco-iranien de Naïri Nahapétian.

Si lors de sa première apparition dans Qui a tué l'ayatollah Kanuni ? ses investigations le poussaient à comprendre une société en proie à une crise existentielle, politique et sociale, il semblerait bien que dans cette nouvelle immersion iranienne, du côté d'Ispahan, il soit plutôt sur les traces d'un tueur en série. Il y a d'abord eu Roxana, chanteuse de variété assassinée dans un théâtre désaffecté et recouverte de tulipes de soie ; puis Nadia tout autant assassinée, tout autant fleurie de soie dans le parking d'un dispensaire. C'est alors que Shadi disparait, et que l'on craint pour sa vie.
Naïri Nahapétian avec Dernier refrain à Ispahan nous immerge dans la société iranienne en plein tumulte. Elle prend soin de révéler une culture ambivalente entre religion passéiste et modernisme. La montée des ayatollahs après la chute du Shah a été la source d'une régression du statut de la femme. Dans ce roman, tout débute avec la volonté de Roxana de revenir chanter sur ses terres alors même que la République islamique interdit aux femmes de chanter en public. Elle fait quelques détours histoire de bien montrer ce que la vie leur offre de plus terrifiant : mariages forcés et convenus, poids de l'aînée sur la cadette, prostitution cachée sous des mariages blancs d'un jour. Mais Dernier refrain à Ispahan se révèle d'une plus grande subtilité que le premier roman de Naïri Nahapétian. Il est bien plus abouti. Il révèle des cassures entre l'armée et la police. D'ailleurs, le roman s'offre un véritable enquêteur forcené en la personne de Velayi, un flic tout ce qu'il y a de moins retors et de plus obstiné à démêler le vrai du faux, épaulé par une profileuse, et qui se joue de Narek de manière confondante. Car le journaliste apparait comme passif tout au long d'une trame qu'il découvre à son rythme, rythme qui semble moins élevé que le nôtre.

Si l'Iran a connu ses tueurs en série - Naïri Nahapétian nous en propose trois -, la résolution de l'enquête permettra d'aboutir à une autre cause somme toute logique de ces meurtres à répétition, avec une conclusion digne d'un roman noir, une écriture fleurie et un ton résolument poétique et mélancolique.


On en parle : Carnet de la Noir'Rôde n°45

Citation

En Iran, nous nous inspirons davantage du comportementalisme que de Freud ou votre incompréhensible Lacan. Je ne porte que peu de foi à toutes ces histoires d'Œdipe. Un bon musulman ne saurait tomber amoureux de sa mère ! Les règles de la charia sont là pour empêcher de telles perversités.

Rédacteur: Julien Védrenne jeudi 01 mars 2012
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