La Maison des tocards

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samedi 20 avril

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Roman - Espionnage

La Maison des tocards

Énigme - Enlèvement MAJ mardi 21 février 2012

Note accordée au livre: 4 sur 5

Grand format
Inédit

Tout public

Prix: 21 €

Mike Herron
Slow Horses - 2010
Traduit de l'anglais par Samuel Sfez
Paris : Presses de la Cité, janvier 2012
384 p. ; 23 x 14 cm
ISBN 978-2-258-08882-5
Coll. "Sang d'encre"

Attention à la révolte des damnés !

Pour éviter l'exécution d'un otage par les membres d'un groupuscule extrémiste, une bande de laissés pour compte se mobilise. Un roman étonnant, atypique, d'un romancier anglais qui mérite d'être découvert.

La maison des tocards est une bâtisse anonyme, à la limite de la ville, où sont regroupés ceux qui ont failli dans leur mission au MI5. Ce "placard" rassemble une dizaine d'individus des deux sexes, dirigé par Jackson Lamb, un ancien dans le métier, un véritable sphinx énigmatique. Son passé obscur, sulfureux, cautionne sa réputation d'aujourd'hui. Parmi ces rejetés du "paradis" de Regent's Park, se trouve River Cartwright. Celui-ci a foiré un exercice dont les conséquences sont désastreuses : cent vingt morts et blessés, trente millions de livres de dégâts, deux milliards et demi de livres perdues pour le tourisme. Bien que ces chiffres aient été inventés par ceux qui avaient imaginé le scénario, il est exclu du saint des saints. Depuis, il vivote. Actuellement, il est chargé de récupérer et d'inventorier, chaque jour, la poubelle d'un journaliste tombé en disgrâce, mais dont il faut vérifier... il ne sait quoi. Et puis, les images d'un jeune garçon menacé de décapitation, circulent sur Internet et font le buzz. Le MI5 est sur les dents. Et le Placard se retrouve impliqué. Ils doivent tous participer...

L'auteur renoue avec le climat des romans d'espionnage où une paranoïa effrénée est de mise. Il crée une ambiance tendue, un monde de secrets et de légendes. Il fait alterner la progression du récit entre les habitants du Placard, l'évolution de la situation de l'otage. Il mêle, ainsi, la présentation de groupuscules nationalistes, leurs motivations, et la révélation des "fautes" qui ont motivé la mise au placard, le jeu trouble des politiciens et du MI5. Il dresse la situation psychologique de l'Angleterre depuis les attentats du 7 juillet 2005 et fait une peinture sans concession du pays, aujourd'hui.

Il brosse une galerie de personnages conditionnés par le goût du secret, installés dans une paranoïa les amenant à se méfier de tout, de tous. Le romancier connaît bien la nature humaine. Il sait la capacité de renoncement à toute dignité de ceux qui veulent gagner ou regagner une place, qu'il s'agisse de politiciens, de responsables économiques ou administratifs.
Mike Herron élabore une histoire astucieuse s'appuyant sur la propension des spécialistes du renseignement à monter les scénarios les plus improbables, mais pas toujours pour servir la raison d'État.

Il fait cohabiter cet univers de noirceur et un humour décapant, allégeant son récit de remarques pertinentes, de réflexions sur les caractères, les attitudes et les motivations.
Il offre une intrigue vigoureuse, qui se concentre sur des destins brisés, des existences ratées, des vies qui n'ont pas pu être construites. Mike Herron sait rendre attachant ces tocards, ces êtres un peu perdus, égarés dans un monde qu'il n'est pas facile de déchiffrer, soumis aux diktats de forces supérieures qui agissent de façon difficilement compréhensible, voire irrationnelle.

Avec ces éléments qui semblent disparates, l'auteur écrit un roman très agréable à lire, très prenant. On peut toutefois s'irriter face à un récit qui semble déséquilibré avec une histoire qui laisse une large place aux présentations des acteurs, aux préliminaires, avant de rentrer dans une action qui alors se précipite. Mais, à la réflexion, cette temporisation est cohérente dans la mesure où, dans le quotidien, la mise en place d'un projet, est souvent plus longue que sa réalisation. Il signe un livre quelque peu amer, à l'image de l'existence de la plupart des humains, faite d'attente, d'incompréhension. Il offre une vision très réaliste d'un monde où tout est chausse-trappe.
Mais au-delà de la noirceur, on s'amuse beaucoup, ce qui, en ces temps incertains est bon à prendre sans réserves.

Avec La Maison des tocards, Mike Herron dévoile l'envers de l'univers de James Bond, peuplé de personnages savoureux, se débattant dans une intrigue délicieusement alambiquée dont la chute est, pour le moins, surprenante.

Citation

Quand elle approchait le miroir de son visage, elle parvenait à distinguer sur sa peau endommagée les lignes par lesquelles la jeunesse s'était enfuie. Un processus accéléré par des choix malavisés, bien que, rétrospectivement, ces choix aient, étrangement souvent, moins ressemblé à de véritables choix qu'à un simple pas de plus.

Rédacteur: Serge Perraud lundi 20 février 2012
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