Le Onzième pion

Promis, si je sors vivant de cette aventure-là, à mon retour je ne lirai plus rien qui fait peur. Fini les histoires de meurtres, de monstres et de zombies. Je choisirai uniquement des livres qui finissent bien, avec des licornes magiques et des princesses à paillettes.
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mardi 19 mars

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Roman - Insolite

Le Onzième pion

Disparition MAJ lundi 16 janvier 2012

Note accordée au livre: 5 sur 5

Grand format
Inédit

Tout public

Prix: 20 €

Heinrich Steinfest
Die feine Nase der Lilli Steinbeck - 2007
Traduit de l'allemand (Autriche) par Corinna Gepner
Paris : Carnets Nord, janvier 2012
408 p. ; 21 x 14 cm
ISBN 978-2-35536-057-2
Coll. "Romans noirs"

Échec et pomme

La pomme est connue pour être le symbole du péché originel au paradis, la tentation du fruit défendu mais aussi comme le moyen de faire périr une rivale trop jeune et trop belle dans un célèbre conte de fées. Croquer à pleines dents dans sa chair juteuse est le moment fatidique où tout bascule à jamais de façon irrémédiable.

Georg Stransky n'aurait jamais imaginé qu'un simple fruit pouvait modifier le cours de sa vie et pourtant il n'allait pas tarder à en faire la désagréable expérience. Georg savoure la douce tranquillité d'un énième dîner dans la salle à manger de son agréable maison de famille. Il est en compagnie de sa jolie femme et sa fille, l'enfant parfaite. Ses pensées vagabondent l'amenant à se poser bêtement la question de son droit de profiter d'un tel bonheur. C'est justement la question à ne pas se poser quand tout va bien. Car c'est pile à cet instant qu'un objet fait éclater une vitre d'une fenêtre de la pièce, finissant sa trajectoire sous la table. Le projectile est en fait une simple pomme et Georg, se penchant pour la ramasser, ne sait pas encore qu'il vient de vivre le moment qui va faire basculer sa vie agréable. Après la stupeur de cet acte de vandalisme gratuit, la pomme est jetée à la poubelle.
Durant la nuit Georg est réveillé par la sonnerie du téléphone. Une voix féminine s'adresse à lui en le questionnant sur la bonne réception de la pomme. Elle doit l'amener à croquer la pomme, lui expliquant qu'elle n'est que l'opératrice venant lui délivrer un message. Il doit mordre dedans sinon d'autres se chargeront de faire du mal à ses proches. Ils sont véritablement bien renseignés sur sa vie et pourraient commencer par empoisonner le cheval de sa fille pour montrer leur détermination. La discussion continue mais Georg finit par obtempérer et avale quelques bouchées. La dernière chose qu'il entend, ressentant déjà les premiers effets, est un "Bonne chance" semblant plutôt indiquer que de la chance il allait en avoir besoin. Ensuite le trou noir...
Viola, son épouse, ne trouve pas son mari au réveil et comprend vite que la pomme joue un rôle important dans sa disparition. La police de son côté, ne prend pas trop au sérieux son récit, y voyant plutôt un cas de mari volage. Viola fait réaliser une analyse du fruit qui va révéler la présence d'un narcotique poussant la police à ouvrir le dossier. À l'arrivée de Lilli Steinbeck, l'enquête prend une tournure très sérieuse. Lilli Steinbeck est une femme très particulière. Sa réputation est irréprochable mais elle refuse de consacrer sa vie au travail et souhaite avoir au moins dix heures de sommeil par nuit. Son physique atypique complète son personnage à part. Elle est assez maigre toujours élégamment vêtue. Mais le gros défaut est planté au milieu de son visage dont on oublie les jolies lignes pour ne plus voir que les multiples cassures de son nez. Steinbeck est spécialisée dans les affaires de rapt, alors son flair lui fait sentir que cette disparition à la mise en scène particulière n'est pas un cas isolé, il y aurait déjà sept autres disparitions d'hommes aussi étranges mais retrouvés morts. Le point commun serait que tous auraient effectué un séjour en Grèce. Et, sentant que le temps joue contre elle, la piste pousse Steinbeck à s'envoler pour Athènes où les grecs ne vont pas forcément l'accueillir de façon amicale ou tout du moins correcte. Elle va subir l'agression d'un pseudo Batman, personnage mi-homme mi-chauve-souris très important tout au long de l'histoire et rencontrer un bizarre détective obèse se déplaçant à coup de déambulateur. Et ce n'est que les débuts de ses étranges rencontres dans un périple compliqué la faisant aussi passer du Yémen à l'île splendide de Saint-Paul pour commencer.

Le Onzième pion n'est pas un roman ordinaire, ni très facile à classer tellement son style est particulier. Heinrich Steinfest nous embarque dans une histoire où la réalité vient se fondre dans l'irréel. Il a imaginé un gigantesque complot international aux ramifications étonnantes, le monde est devenu un jeu d'échecs et les pions sont des hommes possédant des figurines de Batman. Et si l'histoire débute comme une enquête policière avec pour base une drôle de disparition, Steinfest trouve un malin plaisir à venir compliquer la donne en démultipliant les genres avec des touches loufoques, des références mythologiques, des instants philosophiques, des découvertes de drontes présumés disparus, le tout avec une des touches ironiques ou alors profondément existentielles qui entraînent le lecteur à s'interroger sur les implications de cette farce absurde mais prenante que Steinbeck est venue enrayer comme un grain de sable ruinant une machinerie bien huilée.
La quatrième de couverture annonce Le Onzième pion comme un ovni littéraire. Le terme semble particulièrement adapté surtout si on pense que Steinbeck a tout mis minutieusement en place pour balader le lecteur au fil des chapitres construits presque comme des petites scénettes regorgeant de maximes plus ou moins acerbes sur le genre humain.


On en parle : La Vache qui lit n°125 |L'Indic n°23

Citation

Ce n'est pas son rôle. Il perturbe la partie. Il embrouille tout. C'est bien plus qu'une infraction aux règles du jeu.

Rédacteur: Fabien Maurice jeudi 12 janvier 2012
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