Roman policier

Comme à chaque printemps, en cette fin de mai 1892, les vacheries de la plaine montent à l'estive des hauts plateaux du Cézallier. Dans ce pays tout de planéité, aux arbres rares, où les tourbières sont des creux aux verts profonds et les burons l'esquisse des reliefs, les troupeaux s'installent jusqu'à la Saint-Géraud, le 13 octobre.
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Roman - Insolite

Roman policier

Politique MAJ mardi 17 février 2009

Note accordée au livre: 6 sur 5

Poche
Inédit

Tout public

Prix: 6,5 €

Imre Kertész
Detektivtörténet - 1977
Préface d'Imre Kertész
Traduit du hongrois par Natalia Zaremba-Huzsvai, Charles Zaremba
Arles : Babel, octobre 2008
118 p. ; 17 x 11 cm
ISBN 978-2-7427-7787-7

Leçon d'(in)existence…

Roman de l'État policier, réajustant le genre plutôt que lui appartenant, l'ouvrage commence à la manière d'un roman baroque : nous tenons entre les mains un manuscrit confié à un avocat par son client. Un criminel dénommé Martens, qui l'a écrit parce qu'il venait de comprendre la logique du crime qu'il avait commis. Quel crime ? L'histoire qu'il raconte est celle d'un flic quelconque, muté dans une officine dont le rôle est de fabriquer des coupables. Dans une pièce adjacente à son bureau, dans laquelle il n'a jamais mis les pieds, se déroulaient d'inquiétants interrogatoires. Martens se rappelle tout de même que l'un de ses collègues avait inventé une machine à torturer. À l'époque, il pensait qu'ils allaient trop loin. Surtout quand il réalisa que l'un des suspects, Enrique, était innocent. Arrêté. Torturé. Sa vie rompue. Certes, tout autour d'eux la violence était la règle. Mais quand même.

Pas d'intrigue dans ce roman. Ici, les flics sont équipés pour organiser et agir, non pour résoudre des devinettes. L'intelligence du roman de Kertész est d'abord de camper sur les bords mêmes de son objet : la destruction de l'intimité. Tout au long du texte nous est livré en pâture le journal intime d'Enrique, comme un viol que nous, lecteurs, accomplirions par-dessus l'épaule du romancier. Le roman se fait du coup policier. Et chaque lecture y collabore… Le romanesque paraît alors faire naufrage sous la pression d'un lourd cauchemar résiduel : celui de toutes ces dictatures dont n'importe lequel d'entre nous a déjà été le contemporain. Mais il n'en est rien : le statut du texte est bien celui d'un roman. À cette différence près que la faute de Martens est la nôtre. Son crime est rien moins que le nôtre, empruntant les mérites du romanesque pour nous renvoyer à nos silences, nous qui savons si mal lire le romanesque dont se nourrit tout État policier.
La préface de l'auteur invite du reste à penser pareille énormité. L'air de rien, elle nous rappelle la mésaventure éditoriale que connut le manuscrit : les éditeurs trouvaient qu'il manquait "au moins dix feuillets" pour en faire un livre… Trente ans plus tard, prix Nobel aidant, l'un d'entre eux finit par trouver l'audace de le publier. Voilà qui laisse rêveur.

Citation

Il faut croire en quelque chose pour être une ordure.

Rédacteur: Joël Jégouzo lundi 12 janvier 2009
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