Lazy Bird

Je suis née le jour où ma mère est morte. Papa m'a appelée Giulia, comme elle, pour ne pas oublier. Et pourtant, il ne m'en parle jamais, comme si tout cela n'était qu'un tour de magie, la disparation d'un lapin dans un chapeau, rien d'autre qu'un rideau qui tombe.
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Roman - Noir

Lazy Bird

Musique - Disparition MAJ mardi 09 novembre 2010

Note accordée au livre: 5 sur 5

Grand format
Réédition

Tout public

Prix: 19,8 €

Andrée A. Michaud
Paris : Le Seuil, octobre 2010
366 p. ; 23 x 15 cm
ISBN 978-2-02-102299-5

Play it again, Andrée

Bob Richard est albinos. Depuis le suicide de ses parents, il traine sa solitude et vivote. On lui propose un poste comme animateur de radio, la nuit dans un petit bled du Vermont. Il accepte. À peine commence-t-il ses émissions que quelqu'un lui téléphone durant la nuit, lui demandant de lui passer Misty, le célèbre morceau de jazz, et des questions sur le mystérieux Jeff à qui fut dédicacé un morceau.
Puis Bob rencontre une jeune fille, qu'il surnomme Lazy Bird et à qui il dédicace une chanson. Un peu plus tard, il apprend que Jeff, son chien, laissé chez des amis à des centaines de kilomètres, a été victime d'un accident. Il découvre que son prédécesseur avait aussi reçu de appels téléphoniques avant de disparaitre et maintenant c'est au tour de Lazy Bird de s'évaporer.
Évacuons tout de suite la référence à Play Misty For Me (Un frisson dans la nuit), un film qui fit beaucoup pour la carrière de Clint Eastwood, où l'acteur est un animateur radio pourchassé par une fan folle.
En découvrant l'intrigue, l'on pourrait penser à un thriller supplémentaire mais Andrée Michaud lorgne d'un autre coté. Tout d'abord, auteur canadienne, d'expression francophone, ses personnages sont eux-mêmes issus de ces marges entre le Canada et l'Amérique, et les jurons des personnages se ponctuent de "hosties" bienvenues qui accentuent le côté exotique et étrange de cette histoire centrée sur des communautés rurales, de quelques rares personnes qui travaillent la nuit et baignée dans la folie de la quasi totalité des protagonistes.
L'auteur évite toutes les ficelles du thriller (mis à part la montée de l'angoisse vue de manière extrêmement réaliste à travers les yeux de Bob), pour se concentrer sur les victimes. Le premier attentat a lieu sur un chien et échoue. Lazy Bird disparaît, mais c'est une fugue. Elle revient, puis s'évapore et c'est de nouveau une fugue... Les policiers n'écoutent que leur bon sens et préfèrent arrêter Bob Richard, l'albinos de service - il est étranger à la ville et l'énigme avec des références cinématographiques, c'est trop pour eux. Lorsqu'un cadavre est découvert, c'est Bob Richard qui s'en charge et réagit avec une émotivité très bien décrite. Du coup, le roman ressemble à un roman noir gangrené par la folie des victimes (le narrateur voit constamment un cerf albinos qui se balade dans les bois autour de sa maison, on se demande si les pantins qui ricanent dans les caves ont des réponses aux questions) et non par l'ambiance malsaine que mettrait un tueur en série mystérieux. Même si l'auteur au final explicite toute son intrigue dans un retournement logique prenant et crédible qui à l'instar du texte entier ne ressort pas des lois du genre puisque le coupable ne pourra être pris.
Lazy Bird tient par sa parfaite adéquation entre son style et son histoire. Le thème est simple : écrire une variation autour d'un film et d'un genre comme le suspense, en utilisant un genre musical qui utilise lui aussi la variation. Michaud décrit avec justesse, de l'intérieur, les désarrois blues ou jazz de ces personnages, leurs basculements dans la folie, leurs attachements au monde ou leur retrait avec un soin extrême, en prenant son temps : il faut se laisser porter sur la première moitié du roman où l'auteur expose les choses, fait des codas, développe sur un refrain, se permet un solo, revient au thème principal dans une infime variation avant de savourer la deuxième partie où le thème est constamment contrebalancé par des incursions free jazz sauvages où règnent la désolation et le désespoir jusqu'au final halluciné où tout éclate crescendo.


On en parle : La Tête en noir n°148

Citation

Je devais effectivement avoir l'allure du gars que les filles fuient dans la nuit en faisant claquer leurs talons sur les trottoirs mouillés.

Rédacteur: Laurent Greusard mardi 09 novembre 2010
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