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Ma vie des autres (279)
Courts récits de 1000 signes. 279 : exposition moderne. C'est moi qui ai soufflé à Andy de passer de la chirurgie viscérale et digestive à l'art contemporain. Disons même que je lui ai carrément forcé la main. Je suis commissaire d'exposition, il me fallait de l'épate pour la rentrée. Comme il m'opérait de la vésicule biliaire, j'ai eu cette idée de génie de l'associer à mes activités bidon où l'on se fait une notoriété du tonnerre en profitant de la complicité de l'élite intellectuelle et de la crédulité des gogos de la finance. L'art fonctionne comme un dogme et le commissaire d'exposition est son apôtre qui distribue la bonne parole et ouvre la porte de la connaissance. Je propose n'importe quelle bouse que j'emballe de concepts ineptes que personne n'ose contester sous peine de passer pour un ignare. Aujourd'hui, je suis vraiment satisfait des performances d'Andy retransmises en direct sur des écrans. Il opère en public dans la galerie sur des volontaires ou des repris de justice qui monnaient leur participation contre une remise de peine. Les mécènes ont le droit de se faire charcuter gratuitement. Quand à ceux qui acquièrent les œuvres sanguinolentes, ils doivent signer une procuration comme quoi chaque viscère emporté ne servira pas à une quelconque greffe sans accord préalable de l'artiste.
Mille signes. Autant de preuves de vie adressées à autrui que de caractères dans chaque fiction. Chacun à mille existences et chacun est en miettes. "Ma vie des autres" collecte ces miettes et en fait un chemin de cailloux blancs ou noirs qui mène forcément quelque part.
Jan Thirion
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