Contenu
Ma vie des autres (250)
Courts récits de 1000 signes. 250 : descente sans temps mort. La porte saute. Je fonce le premier dans la piaule, arme en avant. Je gueule de ne pas bouger à une vieille femme en chemise de nuit et à une autre, plus jeune, enceinte, dont la robe de chambre s'entrouvre sur sa nudité sous l'effet de surprise. Elles se mettent à crier. Je renverse la première qui me bloque le passage dans l'affolement. 17 qui me suit plaque l'autre femme sur le canapé pour l'empêcher de courir dans une autre pièce. La voix de 9 dans mon dos hurle la même chose que moi en ajoutant le mot Police. J'oublie souvent d'annoncer la couleur. J'ai l'impression que notre uniforme suffit pour qu'on n'ait pas besoin de se présenter. Un type, torse nu, sort de la salle de bains, rasoir électrique à la main. Je l'attrape avant qu'il puisse tenter quoi que ce soit. Je le cloue au mur. Ma clé au bras l'empêche de gigoter. 9 et 11 me doublent et sortent de sa chambre un jeune à poil qu'ils se mettent à tabasser. Il est bon de ramollir les délinquants avant de les envoyer chez le juge. Dans mon oreillette, 5 en bas dans la voiture me dit qu'on s'est trompé d'adresse. Je rappelle les troupes et on déguerpit vite fait.
Mille signes. Autant de preuves de vie adressées à autrui que de caractères dans chaque fiction. Chacun à mille existences et chacun est en miettes. "Ma vie des autres" collecte ces miettes et en fait un chemin de cailloux blancs ou noirs qui mène forcément quelque part.
Jan Thirion
Blog de Jan Thirion
Liens : Jan Thirion
