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382 p. ; 24 x 15 cm
ISBN 978-2-84742-141-5
Actualités
- 15/10 Édition: Parutions de la semaine - 15 octobre
- 17/03 Café littéraire: Le Cercle des lecteurs de mars
- 07/02 Télévision: Maxime Gillio s'entretient avec Franck Thilliez
En août dernier, nous annoncions ici même l'enregistrement à Coudekerque-Branche, dans le Nord, d'un café littéraire animé par Maxime Gillio et dont l'invité était Franck Thilliez. Pour la petite histoire, c'est grâce à cette annonce que nous bénéficions aujourd'hui de la collaboration de Maxime Gillio...
L'émission, destinée à une chaîne de télévision locale gérée par une structure associative, l'ASTV, était promise à la diffusion le 6 février mais a été mise en ligne sur le site de l'ASTV bien en amont. Ainsi que le précise M. Gillio, "il s'agit bien d'un pilote". Espérons que ce sera le début d'une série durable car M. Gillio se révèle un interviewer de haute volée...
Brève présentation de l'ASTV
L'Association synthoise pour la télévision locale est une structure ancienne : elle a été créée en 1982, a lancé les premiers programmes en 1983 et a été officiellement inaugurée en 1984. Cette longue histoire fait de la chaîne développée par l'ASTV l'aînée des chaînes locales françaises. Un vaste projet télévisuel nommé "Grand Projet TNT d'agglomération et du Littoral" est en train de voir le jour qui rassemble de nombreux partenaires, dont l'ASTV.
Association Synthoise pour la Télévision Locale
Place François Mitterrand
BP 155
59792 Grande Synthe Cedex
Tél. : 03.28.62.77.77.
I. Roche/k-libre
Liens : Maxime Gillio |Franck Thilliez - 19/11 Librairie: Deux auteurs à Montpellier
Alice in Horrorland
En 1982, Claude Dehaene est photo-reporter. Il assiste aux massacres de Chabra et Chatila, au Liban. Il s'en sort vivant, mais pas indemne. Une fois rentré en France, profondément traumatisé par ce qu'il a traversé, il quitte son métier et se retire dans une ferme du Nord avec sa famille. En peu de temps il se mue en paysan et vit aussi éloigné du monde qu'il le peut. Bien des années plus tard, il incite sa fille Alice, âgée de vingt-cinq ans, à consulter le psychiatre Luc Graham – elle souffre depuis son enfance de "trous noirs", de larges plages de vide dans sa mémoire où ne s'inscrit aucun souvenir. La psychothérapie s'engage, assortie de toute une batterie de "tests de personnalité" menés à grand renfort d'appareils électroniques dans des locaux du CNRS à Boulogne-Billancourt. Au bout d'un an, le Dr Graham sent qu'il est près d'amener sa patiente à la guérison. Mais lors d'une séance particulièrement délicate, Alice, soumise à un stress insupportable, s'enfuit brusquement. Presque au même moment, son père est blessé de deux coups de couteau – tentative de suicide ou agression ? Tandis qu'il est sous surveillance à l'hôpital Roger Salengro de Lille, Julie Roqueval assistante sociale en psychiatrie, dépose dans ce même hôpital un inconnu qu'elle vient de recueillir en piteux état – d'une maigreur effrayante, recroquevillé tout nu dans une couverture souillée, plongé dans une profonde catatonie.
Entre ces trois pôles narratifs, Franck Thillez développe un récit tortueux, complexe, qui emmène le lecteur aux extrêmes limites comportementales de ce que peut entraîner un syndrome post-traumatique aigu, dans les franges quasi insoutenables de la torture physique et mentales – dans d'indicibles territoires de souffrance.
À suivre Alice dans sa psychothérapie, à traverser avec elle les épreuves que lui imposent ses troubles de mémoire on a un peu l'impression de pousser la porte d'un couloir adjacent à La Mémoire fantôme et de continuer, avec de nouveaux personnages et une autre intrigue, l'âpre exploration psychiatrique des plus sombres perturbations mentales – lesquelles sont, de toute façon, omniprésentes dans les romans de Franck Thillez. Par ailleurs dans Fractures, on retrouve d'autres thèmes et figures récurrents chez cet auteur – la demeure isolée, les labyrinthes souterrains, le rapt, la séquestration, les sévices en tout genre infligés par des bourreaux psychopathes… Mais on lui saura gré de parvenir à les exploiter différemment à chaque roman – à cet égard il témoigne d'une imagination étonnante – de telle manière qu'on identifie leur prégnance sans avoir pour autant l'impression qu'il se répète.
Le récit est entièrement écrit au présent comme s'il ne fallait s'attarder sur rien, et regorge de phrases elliptiques – le rythme est extrêmement rapide, tout entier tendu vers l'efficacité maximale. Au prix, hélas, d'une écriture insuffisamment soignée. Il y a d'abord sa sècheresse, due à l'abondance de ces phrases souvent infinitives ou réduites à un ou deux mots, qui ressemblent à des hachures durement appuyées – ce ne serait pas si gênant s'il n'y avait, en permanence, des formules bizarrement familières ou approximatives, alors que le registre de langue de l'ensemble n'est ni familier, ni argotique. L'on voit, entre autres exemples, les fumeurs et fumeuses tirer systématiquement des "taffes" au lieu de simples "bouffées". Et l'on ne peut pas ne pas remarquer que le roman s'ouvre sur une bien curieuse construction du verbe empêcher – "La misère n'empêche jamais à la vie d'abonder".
De plus, bien des scènes sont à la limite de la vraisemblance – "vraisemblance" étant entendu par rapport à l'économie du récit et non en référence à quelque souci de réalisme – notamment à la fin. L'épilogue quant à lui, avec son lot d'explications offertes d'un coup, déçoit un peu mais l'on conviendra que la nature de l'intrigue ne permettait guère de procéder autrement.
Pinaillage et découpage de cheveux en quatre que ces remarques ? Peut-être... En tout cas, ces échardes n'auraient même pas été relevées si, par ailleurs, le roman n'avait pas de grandes qualités - le public, à en juger par quelques échos glanés çà et là, s'est déjà engoué pour lui. Il faut reconnaître que, pour ce qui est de confronter son lecteur à ce que l'âme humaine peut receler de pire, Franck Thilliez est très fort. Il sait s'y prendre pour ourdir une intrigue retorse, renouveler ses thèmes, et pour vous contraindre à ne pas interrompre votre lecture, fût-ce au prix d'un manque de rigueur et de recherche quant à la part stylistique de l'écriture.
La note, alors... Dilemme ! Ce pourrait être une moyenne entre le 5 pour la construction malgré ses fissures et le 1 pour le relâchement et les aspérités d'écriture qui fâchent. En fin de compte, je lui accorde un 4 pour m'avoir fait oublier, une après-midi durant, que novembre naissait sous une pluie battue par les vents...
On en parle : Alibis n°34
Nominations :
Prix des Lecteurs Quais du Polar 2010
Prix des lecteurs/lectrices de critiqueslibres.com - policier-thriller 2012
Citation
Alice n'était plus Alice. Mais Nicolas. Un enfant de huit ans.