Ne sautez pas !

Lui, l'architecte, l'esthète épris d'histoire de l'art, le spécialiste de la statuaire antique, découvrir devant ses yeux ébahis un modèle vivant pour lequel se seraient certainement damnés des Phidias, Polyclète ou autre Praxitèle.
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jeudi 28 mars

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Roman - Noir

Ne sautez pas !

Social - Chantage MAJ lundi 31 octobre 2016

Note accordée au livre: 3 sur 5

Grand format
Inédit

Tout public

Prix: 19 €

Frédéric Ernotte
Paris : Lajouanie, août 2016
304 p. ;
Coll. "Roman policier, mais pas que"

Poker menteur

Mathias aime la vitesse. Surtout quand il est au volant de sa voiture. Comme c'est désormais interdit, il est condamné à un travail d'intérêt général. Ainsi il se retrouve à faire du porte-à-porte (au nez) pour une ONG. C'est en exerçant cette activités obligatoire que Mathias réalise à quel point ses semblables et lui ne sont pas, en dehors des heures du journal télévisé, à l'écoute des vrais problèmes de l'humanité, des drames qui touchent des peuples qui se trouvent à l'autre bout du monde et dont les malheurs n'émeuvent que le temps des reportages. Sentiment renforcé quand réapparaît à Bruxelles (car l'action se passe à Bruxelles) Raphaël, le frère d'Élisa, la compagne de Mathias. Raphaël enfonce le clou dans la prise de conscience de Mathias car Raphaël bosse dans l'humanitaire. Et Élisa qui est infirmière en voit de belle aussi. Et Mathias, qui officiellement est laveur de carreaux sur les buildings des grosses sociétés qui font de gros chiffres d'affaire, gamberge à tout ça : la misère du tiers-monde, l'indifférence des pays riches, le temps qui passe, le fait qu'il n'est pas vieux mais que sa jeunesse est déjà derrière lui, qu'il n'a pas été au bout de son ambition qui était de devenir vétérinaire, qu'il se laisse porter sans rien espérer, que concrètement il ne fait rien pour les autres, qu'il pourrait/devrait faire mieux/faire plus. Et puis... Et puis arrive le coup de pouce du destin. Alors qu'il est assis peinard sur la corniche du toit d'un des immeubles dont il nettoie les vitres, à se taper un bon casse-dalle, les écouteurs sur les oreilles lui balançant de la zique, un homme surgit, affolé, lui demandant de restez calme, le priant de l'écouter, le suppliant de ne pas sauter. Pas sauter ? Avouez que quand on n'a nullement l'intention de se foutre en l'air, ça peut prêter à sourire, non ? Mathias, lui, il croit à une blague. Alors, il décide d'en faire une aussi. Il dit au mec qu'il ne sautera pas si le grand patron du grand immeuble lui signe un chèque de cinq mille euros. Pas pour lui, hein ! Pour association qui en a besoin. Et curieusement c'est là que ça ne devient plus drôle du tout. Car le mec revient avec un chèque signé par le grand patron. Et grâce à Mathias, une association reçoit un don de cinq mille euros. Vous entravez l'engrenage ?
Avec Ne sautez pas !, Frédéric Ernotte a écrit un roman sur l'humain. Ouaip, mes loulous, rien que ça. Et si le genre c'est le genre policier, je réponds ok, parce qu'on est dans l'autopsie. Sauf qu'elle a lieu quand le cadavre est encore vivant et qu'elle concerne l'âme. L'âme humaine. Je vous rassure tout de suite quand même, Frédéric Ernotte n'est pas un philosophe mais bel et bien un romancier. Il y a dans son histoire des personnages sympathiques, il y a des (un en particulier, et encore, je vais être honnête, même lui, je comprends son comportement et je le trouve humain, abjectement humain) personnages antipathiques, mais dans l'ensemble il y a ce que nous sommes en majorité : des tièdes. Le personnage principal de ce roman, Mathias, est un anti-héros... tiède (au début en tout cas). Il est humain (j'y reviens pas, je persiste et signe). Il n'est ni un prix de vertu, ni sans défauts, il est complexe, contradictoire, emprunt de bonnes intentions, maladroit, dépassé, hésitant, égoïste, influençable et finalement spectateur. Vous vous reconnaissez ? Spectateur, dans la réalité, il le serait resté. Il ne se serait sûrement rien passé. Il aurait laissé Raphaël sauver le monde, l'aurait aimé d'abord puis détesté pour ça. Mathias c'est le genre à se promettre qu'une fois son travail d'intérêt général terminé il continuera à faire des actions pour les autres. Et puis comme pour quand on décide d'aller courir le matin, au bout d'une semaine il aurait oublié de se lever. Mais on n'est pas dans la réalité, on est dans un roman. Et par conséquent l'anti-héros se retrouve plongé dans un engrenage qu'il n'a pas provoqué, certes, mais qu'il encourage, développe, améliore dans le but désintéressé de servir "la bonne cause". Et c'est la toute la perversité du roman. Car Mathias ne fait rien pour lui (allez, concédons que ça lui fait reluire l'amour propre, ça aussi c'est humain). Ce qu'il veut c'est toucher en plein cœur des patrons pour les inciter à faire des dons à des associations qui viennent en aide aux plus défavorisés. Noble entreprise me direz-vous. Et qui doit permettre de beaucoup mieux dormir la nuit, voire d'adorer se regarder dans la glace.. Qui n'a pas rêvé de devenir Robin des bois ? Rêve, réalité, même dans les romans, le décalage entre les deux peut être violent.

Citation

Pour obtenir cent mille euros, on peut les demander à une personne riche. On peut aussi demander un euro à cent mille personnes. Tout est dans l'équilibre et le dosage. Mes cibles doivent rester des entreprises et je me vois mal en sélectionner autant. Partant des cinq mille euros qui semblent me réussir, viser vingt sociétés devrait suffire.

Rédacteur: François Legay lundi 31 octobre 2016
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