L'Affaire Cabre d'or

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Roman - Policier

L'Affaire Cabre d'or

Vengeance - Assassinat MAJ mercredi 16 septembre 2015

Note accordée au livre: 4 sur 5

Grand format
Inédit

Tout public

Prix: 20,5 €

Édouard Brasey
Paris : Calmann-Lévy, mars 2015
400 p. ; 23 x 15 cm
ISBN 978-2-7021-5594-3
Coll. "France toujours et aujourd'hui"

Les vieux mythes ont la peau dure

La quiétude provençale du commissaire Guerrigue alors en convalescence est troublée par la mort d'un clochard qui dormait dans une voiture que l'on a incendié. Plus tard, trois enfants du principal suspect seront à leur tour assassiné. "C'est dans les vieux pots que l'on fait les meilleures soupes." Édouard Brasey situe son intrigue au début des années 1960 en Provence, ce qui permet des plaisanteries sur le passé et la nostalgie. Comme Garrigue, son commissaire, s'inquiète de la conduite automobile trop rapide, on en vient à évoquer l'idée d'une limitation de vitesse et de radars pour contrôler ce qui fait rire tant cela s'apparente à de la science-fiction. De manière moins anecdotique, l'on verra au milieu du roman la rencontre avec un directeur de maison psychiatrique qui utilise déjà les techniques de l'ouverture par l'art, des patients en milieu ouvert. En tout cas, il s'agit d'années charnières et l'auteur oppose son commissaire (qui a vécu la guerre en étant déjà policier) à une bande de jeunes policiers, de marlous des cités avec blousons de cuir et verbe facile, comme autant de Jean-Paul Belmondo en puissance. Pour bien montrer cette entrée dans le monde moderne, le roman s'ouvre par l'incendie criminel d'une DS - celle de Léon Jourdan, le landiculteur ! De plus, les crimes qui vont ensanglanter et effrayer cette région rurale voient arriver sur leurs lieux des journalistes qui usent de tous les expédients pour "faire leur métier". Parmi eux, une jeune femme qui n'a pas froid aux yeux, qui avale à satiété du Coca et qui fonce en pantalon, ce qui ne peut que troubler un commissaire peu habitué aux renversements des valeurs. Mais à l'inverse, il y a des constantes comme la guerre ouverte entre gendarmes et policiers, et le commissaire Garrigue tente de mener son enquête, comme d'autres mangent une blanquette, à l'ancienne, en interrogeant les suspects, en sondant les cœurs et les reins. Dans ce côté traditionnel, il y a aussi les suspects car nous sommes plongés dabs une histoire de vengeance qui met en scène un patriarche tellement ancré dans son métier de paysan qu'il a besoin de bras pour le seconder et que, du coup, lorsqu'il naît une fille dans sa famille, elle a tendance à mourir très vite. Passe alors dans l'intrigue une jeune bohémienne qui fut la compagne de ce paysan durant la Seconde Guerre mondiale et qui fut emprisonnée, autre élément qui date l'histoire et l'ancre dans la réalité de notre roman policier "ancien" - celui de Léo Malet, d'André Héléna ou de Georges Simenon.
Pour contrebalancer ces éléments qui oscillent entre tradition et modernité, L'Affaire Cabre d'or se base sur des éléments mythiques. La chèvre d'or du titre renvoie à la toison d'or et par ricochet à la tragique histoire de Médée. Ce décor héllène fait un écho bienvenu à l'intrigue qui se situe du côté de Gordes, aux falaises d'ocre, qui, comme, beaucoup de régions françaises, vivait en 1960 les premiers assauts de la modernité face à la pérennité des situations depuis des millénaires. Une partie de l'énigme trouve par exemple la solution les ruines des Bories. Tous ces éléments soutiennent une histoire classique de vengeance, à plusieurs étages, dépassant les générations. Dès le départ, le paysan au centre des meurtres est mal vu par le commissaire car ce dernier pense qu'il a été parmi ceux qui ont dénoncé sa femme, juive, cachée à Gordes durant la Seconde Guerre mondiale. Et plus les meurtres se déroulent, réduisant à rien la famille du paysan, plus le commissaire s'enfonce dans le passé pour comprendre ce qui s'est passé. Sa psychologie, fouillée, sa mélancolie (il se sent vieux et dépassé dans un monde qui commence à bouger trop vite malgré la présence de Rosalie, son animal domestique qui n'est autre qu'une truie, et de ses ruches), le soin apporté au décor et à la reconstitution historique, un humour discret, font de ce roman une très bonne surprise.

Citation

Buvez du Coca-Cola. C'est américain, mais ça ne peut pas vous faire de mal.

Rédacteur: Laurent Greusard mercredi 16 septembre 2015
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