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mardi 19 mars

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Nouvelle - Noir

400 coups de ciseaux et autres histoires

Social MAJ lundi 30 juin 2014

Note accordée au livre: 4 sur 5

Poche
Réédition

Tout public

Prix: 6,6 €

Thierry Jonquet
Paris : Points, mars 2014
252 p. ; 18 x 11 cm
ISBN 978-2-7578-4159-4
Coll. "Roman noir", 3222

Pas de jonquilles pour Jonquet

Thierry Jonquet nous manque. Disparu en 2009, il aura renouvelé le polar français sans rien céder de ses convictions personnelles, celles de l'ancien trotskyste qu'il fut et de l'homme qui, au gré de son évolution professionnelle, aura fréquenté tous ceux dont la société ne veut plus, les vieux, les fous, les suicidés de la société.
Mais Jonquet, ce n'est pas seulement un écrivain soucieux de situer ses histoires dans un cadre sociologique très inspiré par le fait divers, c'est aussi un homme travaillé par la monstruosité et la question du Mal. Comme il l'écrit : "le roman noir est condamné à un concubinage forcé avec la barbarie, cette courtisane au regard torve, aux vilaines manières". S'il vivait encore aujourd'hui, que n'aurait-il pas écrit sur l'affaire Fofana, la randonnée abjecte de Mohammed Merah ou l'entrée de notre vieux monde "humaniste" dans le devenir du post-humain où la manipulation et le commerce des corps se confondent avec la mondialisation du profit ?
400 coups de ciseaux réuni vingt nouvelles écrites entre 1989 et 2009, et un texte autobiographique où Jonquet s'explique sur son itinéraire d'écrivain. Ceux qui connaissent ses romans y retrouveront ses thèmes favoris, la perversion, la violence faite aux corps des asociaux ou des esprits simples, la délinquance endémique des banlieues, l'emprise de la société du spectacle sur les comportements, etc.
Jonquet, outre son regard de sociologue acéré, est en même temps un conteur époustouflant capable de rendre cocasse la pire des situations, comme dans "L'Imprudent" où un pauvre type zoophile est conduit à commettre un meurtre imbécile parce qu'il a perdu ses vêtements. Dans "Art conceptuel", Jonquet ridiculise avec brio ces artistes qui font de l'évènementiel avec n'importe quoi, n'importe qui, surtout s'ils sont pauvres et avides de gagner un peu d'argent. Parfois, Jonquet tente une ouverture vers le fantastique ("Abel dans les tunnels", nouvelle mettant en scène le fils du Diable) ou vers le récit d'anticipation ("Ma puce", ou comment vider les prisons en "puçant" les délinquants comme du bétail). En le lisant, on songe à ses romans comme Ad vitam aeternam ou Ils sont votre épouvante et vous êtes leur crainte. En un sens, ce recueil fonctionne comme "un laboratoire d'idées", la nouvelle devenant la forme ramassée d'un roman futur.
Jonquet, un écrivain engagé ? Oui et non. Si "les rapports de production", pour reprendre une expression chère à Manchette, poussent souvent ses personnage à commettre l'impensable – vendre un enfant mort, utiliser des SDF pour une expo d'art contemporain –Jonquet ne propose aucune solution en retour, sans doute parce que la question du Mal, même passée au crible de l'analyse sociale, reste irréductible à toute forme de transformation politique.
En fait, Jonquet est un trotskyste doublé d'un moraliste et d'un satirique : il sait bien qu'il y a des choses qui ne changeront jamais, car la nature humaine est ainsi faite qu'elle n'aime pas spécialement faire le Bien. Cependant, il reste un révolté et, par la grâce de son talent, il nous immunise contre l'indifférence et la bêtise qui changent trop souvent les hommes en bêtes immondes.

NdR - Le recueil comporte les textes suivants : "Voilà comment ça s"est passé", "Sommeil", "Saint-Cantan, in memoriam", "L'Imprudent", "C'est toujours les p'tits qui trinquent", "Abel dans les tunnels", "Nadine", "Art conceptuel", "Mémé Zonzon, le mystère de la cellule 604", "Hambourg, premier amour", "25", "Ma puce", "Votre histoire ne tient pas la route", "Le Chef du réseau", "Un débat citoyen", "Terminus Nord", "La Chaîne du froid, entre Calais et Douvres", "Dans d'autres pays, qui sait", "Pas de fleurs pour Algernon", "400 coups de ciseaux" & "Le Vrai du faux".

Citation

Socialisme ou barbarie ! C'est le slogan qui m'a le plus hanté. Force est de constater que si le socialisme nous a posé un beau lapin, la barbarie, elle, est bien au rendez-vous.

Rédacteur: Pascal Hérault vendredi 27 juin 2014
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