Les Nouvelles affaires criminelles de l'Aveyron 

J'étais incapable de penser à une question qui, faisant suite à l'interrogatoire en contre de Royce, ferait oublier aux jurés ce qu'il avait dit et les ramènerait à ce que moi, j'avais prouvé.
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jeudi 28 mars

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Essai - Policier

Les Nouvelles affaires criminelles de l'Aveyron 

Assassinat - Faits divers MAJ mardi 21 mai 2013

Note accordée au livre: 4 sur 5

Grand format
Inédit

Tout public

Prix: 26 €

Jean-Michel Cosson
Riom : De Borée, mai 2013
384 p. ; illustrations en couleur ; 24 x 16 cm
ISBN 978-2-8129-0844-6
Coll. "Histoire et documents"

Ça tourne pas rond dans l'Aveyron

Jean-Michel Cosson est l'un des auteurs les plus compétents de cette riche collection. Pour y arriver, il ne s'agit pas seulement de collecter des histoires criminelles dans les archives ou les journaux. Encore faut-il les mettre en scène et, cela sans se départir de l'écriture rigoureuse de l'historien. C'est un exercice difficile car trop de rigueur et de froideur engendrent le désintérêt du grand public qui déteste les notes en bas de page. A contrario, trop de concessions dramatiques et surtout de formes littéraires non abouties car reposant uniquement sur de grosses ficelles de structures (raconter le fait par un narrateur impliqué sous forme de monologue, lettre, dialogue, rapport etc. ce que nous appelons la novélisation) font basculer l'ouvrage dans un genre boiteux bourré de clichés et de mauvais style donc plutôt bas de gamme. Jean-Michel Cosson a pour lui le fait que son regard est ouvert à 360° et qu'il peut enrichir son récit du simple fait divers par des descriptions des paysages contemporains, de l'action mais surtout par une connaissance de l'histoire de la région, y compris les mœurs et le patois, les noms des ustensiles agraires... De plus, il aime détailler les procès en alignant quelques biographies d'avocats ou de juges, rappeler des affaires antérieures et prolonger ainsi ses faits qui se trouvent enrichis. Il aime dépasser le moment du verdict en détaillant parfois les affres du condamné à mort et ceux du bourreau venant dans la ville avec les bois de la guillotine qu'il monte pendant la nuit avec ses aides avant de procéder à la cérémonie de mise à mort lorsque les premiers rayons du soleil se lèvent sur Rodez. Il aime aussi les complaintes écrites après les exécutions, et qui racontent les tragiques destins comme celui de Mandrin venu en Rouergue en 1754 (Compagnons de misère/Allez dire à ma mère/Qu'ell'ne me verra plus/J'suis un enfant perdu) ou celui moins connu de Marie Frisquette, décapitée en 1841 pour empoisonnement de son mari sous l'instigation de son amant qui disparut pour ne pas se faire prendre. Marie se cacha dans une grange sous la protection d'un énorme chien de garde qui fit fuir les gendarmes. Il fallut l'abattre pour s'emparer d'elle. On retarda son exécution car elle se déclara enceinte et accoucha en prison de jumeaux monstrueux (Me voilà donc sur l'échafaud/Pour périr d'après ma sentence/Je livre ma tête au bourreau/Ah ! Quelle horrible pénitence).

Outre ces deux affaires, le recueil abonde en histoires se déroulant dans le milieu paysan. Alcool, sexe et argent sont bien sûr les trois mamelles du crime. Des viols de petites ou de jeunes filles (Frère Léotade en 1848, Jean Terry en 1910, Henri Bourdon en 1936 dernier exécuté dans le département), des vols, des attentats anarchiques, des règlements de compte pendant la guerre et après, des meurtres ; le spectre est grand et habituel. On retiendra le récit palpitant du lynchage par la foule de l'ingénieur Watrin, sous-directeur des mines de Decazeville, défenestré, roué de coups et mutilé en janvier 1886. Jean-Michel Cosson parvient parfaitement à rendre la montée de haine populaire suite à la réception de la paie ponctionnée, la misère des ouvriers, l'affairisme des patrons, le paternalisme et l'intérêt qui pousse la compagnie à ouvrir ses propres magasins qui ruinent les commerçants locaux, les aspirations syndicales, les manifestations précédentes réprimées dans le sang. Autoritaire et sûr de lui, Watrin fait front au mouvement mais la vague le submerge malgré l'aide des autres ingénieurs, puis du maire. L'hystérie des femmes finira par attiser la sauvagerie et conduire au pire. L'Abbé Goude est jugé quelque jours avant Noël 1889, c'est une cause célèbre car jamais on a vu un prêtre aussi débauché. Tentative d'empoisonnement, vols, falsifications de documents, escroqueries, viols de garçons et de filles et débauches diverses. Celui qui fut pendant longtemps protégé par l'Église et dont de nombreux méfaits étaient prescrits ne survivra que quelques années au bagne de Cayenne. À Toulouse en 1847, l'affaire de Frère Léotade, accusé, lui, du viol et du meurtre de la petite Cécile Combette dont le corps a été balancé par-dessus le mur du jardin des Frères défraie la chronique. C'est aussi un modèle d'enquête en lieu clos avec des examens médico-légaux étonnants (des graines trouvées dans des matières fécales souillant une chemise par exemple) qui a été amplement plus développé par Pierre Bouchardon dans l'un de ses titres. Impossible de résumer ici ces vingt-sept histoires ainsi que les vingt et un résumés qui suivent. Voilà un recueil imposant, riche de renseignements, dû à une plume intelligente mais qui sait se rendre accessible.

Citation

Ce n'est pas tous les jours, en effet, qu'une cour d'assises fait comparaître un curé pour viol, attentats à la pudeur, faux et usages de faux. En ce temps-là, le curé Boudes passionne l'Aveyron tout entière, donnant du grain à moudre à la presse républicaine et anticléricale. 

Rédacteur: Michel Amelin lundi 20 mai 2013
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