Place des trépassés : Djemáa el-Fna

Je n'étais personne, un mort en puissance qui ne le sait pas encore, une ombre traversant les villes et les chambres vides des hôtels, et qui lisait, quand le sommeil tardait à venir, les instructions à suivre en cas d'incendie.
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vendredi 29 mars

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Roman - Noir

Place des trépassés : Djemáa el-Fna

Politique - Sportif MAJ mercredi 16 février 2011

Note accordée au livre: 3 sur 5

Poche
Inédit

Tout public

Prix: 13 €

Gerardo Lambertoni
Vallauris : Atout, novembre 2001
176 p. ; 17 x 12 cm
ISBN 978-2-912742-21-8
Coll. "Pique rouge"

Une balle : jeu ou munition ?

Younes est un jeune Marocain passionné par le football, qui passe ses journées à s'entraîner. Tout d'abord, dans les rues de son village, puis sur une grande place de la Capitale où il se lie d'amitié avec son grand-père qui vit sur cette place d'un petit commerce étalé par terre. Repéré par un entraîneur local, Younes s'améliore, découvre la vie, grandit, veut partir pour l'Europe. Mais la vraie vie le rattrape un soir de match de Coupe du monde.
Le récit se compose de deux parties. L'ouverture et la clôture sont de nature proprement policière ou noire : des personnes désœuvrées tuent un homme et elles seront à leur tour tuées. Tout le corps du livre se concentre sur la figure d'un jeune homme d'un pays pauvre qui désire jouer du mieux qu'il peut au football, en faire un métier, et qui découvre que cette filière professionnelle n'est qu'un des pâles reflets du capitalisme moderne.
Le roman s'ouvre sur la douleur d'une foule : celle des Marocains qui combattent pour le match de leur vie, celui qui doit les propulser dans la cour des grands du football. Mais, même en gagnant, ils sont les dindons de la farce ! Deux autres équipes en jouant moyennement ont assuré leur qualification et les ont éliminés par leur match nul (à tous les sens du terme). Parabole parfaite du monde : les "gros" s'arrangent toujours dans votre dos. Et la douleur de cette foule va se retourner contre un plus pauvre, quelqu'un qui n'est pas responsable mais a le malheur d'être là et de ne pas pouvoir se défendre.
Le récit tend alors vers une autre parabole du monde capitaliste : le pillage des talents du Sud par les pays du Nord, décrit non pas de manière abstraite mais à travers le destin exemplaire d'un jeune homme qui sait tout faire avec ses pieds.
Le tout est décrit non pas de manière lourde, politiquement empesé, mais avec beaucoup d'humanité, comme baigné par le soleil de la Méditerranée. Même le voyage d'Afrique en Europe, vécu de manière clandestine, est raconté comme une traversée normale, sans misérabilisme. À l'instar des contes orientaux, le roman repose sur ce mélange entre poésie douce des paysages et des chaleurs marocains et vie quotidienne des personnages.
Plus centré sur l'itinéraire d'un personnage dans une boucle temporelle, le final reprenant la scène d'ouverture pour la compléter, Place des trépassés décrit le monde actuel avec finesse. Lorsque Younes rêve qu'il est en finale de la coupe du monde, il doit marquer le penalty qui le sacrera champion du monde. Mais il sait que cela ne sert à rien et il part, en laissant la balle sur son point blanc, hué par la foule. Alors, éloigné d'une intrigue policière au sens strict du terme, le roman s'ancre avec force et poésie dans le monde, où, pour être humain, il suffit de peu de choses et de croire en ses valeurs.

Citation

Je me réveille invariablement dans la position du fœtus recroquevillé. Frôlé par les cafards. En goal volant déchu avec du vide entre ses gants devenus ridicules.

Rédacteur: Laurent Greusard lundi 14 février 2011
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