Contenu
Meurtre au café de l'Arbre Sec
Grand format
Inédit
Tout public
Quand la cuisine mène à l'aventure...
Quentin est un comédien qui a pris un rôle dans un roman. Mais, le personnage et le cadre, un livre culinaire, ne lui plaisent guère. Au Salon de Saint-Malo, motivé par la puissante odeur d'algues, il prend son élan pour sortir de l'ouvrage. Il se retrouve chez une jeune femme qui l'interpelle d'un air décidé. C'est Constance Savoisy, l'héroïne de Souper mortel aux étuves, au Moyen Âge. Il lui explique qu'il vient des années 2000, qu'il fait partie de la saga des Savoisy, une lignée de cuisiniers ayant traversé les siècles. Devant son air perdu, elle lui explique qu'il ne peut quitter son poste de personnage sans autorisation expresse de l'auteur (c'est dans le contrat), mais qu'il peut voyager dans tous les livres de l'écrivain. Elle veut savoir ce qu'est devenue sa lignée. Quand elle apprend que l'héroïne du roman se déroulant au XXIe siècle a tué pour une histoire de manuscrit volé, Constance blêmit. Est-ce qu'il s'agit du Mesnagier de Paris rédigé par son premier mari ? C'est un document unique qui doit rester absolument dans la famille. Quentin, qui n'est pas insensible à son charme, accepte de l'aider, sans réfléchir. C'est ainsi qu'il se retrouve à Ripaille, pour s'assurer que Jacques, le fils de Constance, est toujours en possession du document qu'elle lui a confié lorsqu'il est parti seconder maître Chiquard, à la cour du duc de Savoie.
Quentin a du mal à gagner la confiance de Jacques. C'est lors de la réception du duc de Bourgogne qu'il saisit l'opportunité de l'aider à devenir le successeur du maître cuisinier. Mais Delatraz, un tire-au-flanc chapardeur, veut la place. Il s'empare de manière violente du manuscrit. Constance et Quentin vont se lancer dans une quête, à travers les siècles et les générations de Savoisy, pour remettre la main sur le Mesnagier.
Dans leur périple, après Genève, Liège, Paris et Bruxelles, ils sont amenés à aider Jean-François Savoisy, cafetier rue de l'Arbre Sec. Son établissement, florissant grâce aux glaces qu'il confectionne, est fréquenté par nombre d'intellectuels dont Diderot. L'Encyclopédie, œuvre maîtresse du philosophe est interdite sous la pression du parti dévot piloté par les jésuites. Avant qu'elle ne soit saisie, Diderot répartit ses manuscrits chez des amis sûrs. C'est ainsi qu'il confie à Maïette, l'épouse de Jean-François, un document explosif...
Dans Meurtre au café de l'Arbre Sec, Michèle Barrière imagine une construction narrative pour le moins originale. Sur un schéma empruntant à la science-fiction, elle réinvente le voyage dans le temps, faisant passer ses personnages d'époque en époque. Cette pirouette scénaristique lui permet de faire revisiter aux lecteurs toute la saga culinaire des Savoisy. Elle apporte des éléments complémentaires aux intrigues déjà publiées et introduit un volet inédit situé en 1759 où elle intègre Diderot, son encyclopédie et Voltaire. Par ce survol, l'auteur apporte une cohésion à sa fresque, un lien que l'on avait du mal à percevoir à la lecture des différents épisodes.
Avec ce voyage à travers les siècles, Michèle Barrière brosse les grandes étapes d'une véritable histoire de la cuisine, du Moyen Âge à la période contemporaine. Elle intègre ces données avec aisance dans le cours de l'intrigue, les transformant en ressorts de l'action, en moteurs des péripéties, en occasions de rebondissements. Outre les composants des plats, elle s'attache à faire revivre les grandes figures, quelques maîtres en la matière qui ont su marquer leur art par une avancée significative dans la confection des mets ou dans l'esprit de la gastronomie. Elle émaille son récit d'anecdotes sur les époques traversées par les héros, sur les fondements des sociétés comme, par exemple, l'effarement de Constance quand elle apprend que tout le monde consomme des légumes : "Je n'arrive pas à imaginer que les seigneurs en mangent. C'est terriblement dangereux. Il est de notoriété publique qu'oignons, ails, échalotes, navets et poireaux ne peuvent être mangés que par ceux de petite condition" ou sur la constatation que : "... les cuisiniers sont souvent portés sur la lubricité...". Elle illustre parfaitement la tradition orale dans la transmission des recettes, dans la formation, tant le nombre d'illettrés était important. Elle montre aussi que la cuisine, la débauche des plats, (cent quarante-huit pour la réception d'un prince-évêque à Liège) était une façon d'étaler sa supériorité, d'affirmer sa suprématie.
Michèle Barrière ne se prive pas pour mettre ses personnages en péril, tout en faisant preuve de beaucoup d'humour en s'appuyant, particulièrement sur le décalage des personnages et le choc de cultures différentes. On sourit et on rit souvent à la lecture de Meurtre au café de l'Arbre Sec.
L'auteur impulse un ton guilleret à son roman, un livre qui se "dévore" avec grand plaisir, tant l'auteur sait mettre l'eau à la bouche et développer une intrigue passionnante.
Citation
Nous sommes tous des personnages de roman. Moi je viens du XXIe siècle et Constance du XIVe siècle. Nous menons une quête qui nous fait traverser les siècles.