k-libre - texte - dans un rade d’la butte-aux-cailles… (iii)

Le froid, les pluies acides, mais aussi la sécheresse s'étaient alors abattus sur une grande partie du continent asiatique, apportant avec eux la famine, qui aiguise les appétits, et l'anarchie, qui aiguise les couteaux.
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Dans un rade d’la Butte-aux-Cailles… (III)

Jeudi 27 août 2009 - Des passionnés parlant de leurs passions seraient presque intarissables – surtout lorsque lesdites passions sont aussi vastes que la culture populaire et/ou prenantes comme peut l’être la fabrication du ChériBibi… Il était donc inévitable que l’entretien se mue en un boulevard conversationnel vaste lui aussi, sur lequel soit dit en passant je ne me lassais pas de circuler. Mais comme les meilleures choses ont une fin…


Lire par ici la première partie...
et la deuxième.
plus d'info sur cette photo
© Isabelle Roche



La petite fabrique chéribibine

k-libre : Je voudrais aborder de façon plus précise le processus de fabrication d’un numéro… C’est un travail collectif, mais il y a je suppose une tête pensante ?
Daniel & Vince : C’est de la monarchie directe ! C’est comme chez de vieux royalistes – euh, non parce que monarchistes et royalistes c’est pas pareil…
Daniel : Bon, on va dire que je suis le coordinateur de rédaction – le rédac’chef sans chef ! Faut dire que avant d’avoir mon boulot actuel j’étais en ASS, j’avais donc tout le temps de m’occuper de la revue alors que les autres avaient tous un travail à côté. Donc comment ça se passe concrètement pour faire un numéro ? Eh bien ce sont surtout des discussions – "Tiens, toi tu es sur quoi ? Et toi, tu as quelque chose de prêt ?…" Et pour le montage du numéro, je fais quand même en sorte de donner la priorité à ceux qui rendent leur travail en temps en en heure.
Vince : En général tu as des thèmes à exploiter, et tu les proposes des mois, voire des années à l’avance…
Daniel : Là, j’ai préparé des pré-sommaires jusqu’en 2012 ! Ça m’éclate vachement de faire des pré-sommaires, que je modifie sans arrêt [rires] ! Sans qu’on décide au départ d’une thématique précise pour chaque numéro, y a tout de même des thèmes plus ou moins affirmés qui se dessinent et, comme je passe énormément de temps à penser au chemin de fer, je me dis "tiens y a ça qui irait bien avec ça, et ça avec ça…" – par exemple, dans le numéro 2 qui avait une thématique western, j’ai inséré l’article sur le punk texan.
Vince : On met beaucoup d’interviews pour tenir la périodicité de la revue, puis après il y a un recentrage qui s’opère : chacun dit un peu ce qu’il pense, et ensuite on insère des interventions qui ne sont pas forcément liées au thème.
Daniel : Par exemple, j’ai un pote qui s’appelle Clément, il est musicien et il va souvent au Bénin. Du coup il m’a proposé un article sur l’afro-beat au Bénin… Or moi, l’afro-beat je connais pas trop mais je lui ai dit OK, vas-y fais ton truc. Et je trouve que son article donne vraiment envie de s’intéresser au sujet ; c’est ça qui est important.
Vince : Oui ; la façon dont tu donnes une information, c’est aussi important que l’information qui est donnée. Sans avoir la prétention de dire qu’on écrit super bien, c’est de donner envie de s’intéresser à ce dont on parle qui me paraît intéressant.
Daniel : En faisant la revue, on reste guidés par la curiosité, l’attrait pour les marges, et l’envie de partager. Que ce soit avec le fanzine ou avec la revue, j’ai surtout envie de faire quelque chose d’éclectique. Pas comme Mad movies, et d’autres magazines vendus en kiosque pour lesquels j’ai un certain respect (ils sont rares…) qui sont hyperspécialisés. Par exemple dans Natty Dread [magazine bimestriel spécialisé dans l’univers reggae dont le premier numéro est sorti en juin 2000 et disposant d’un site internet à partir duquel on peut s’abonner et acheter d’anciens numéros – NdR] on ne parle que de reggae, et si jamais on évoque des films jamaïcains, ce sera que des films de reggae – n’empêche que j’admire le travail de ces passionnés qui ont réussi à transformer un fanzine en une très belle revue. Dans Mad c’est pareil, on ne s’intéresse qu’à un type de cinéma, même si c’est large. Et en parlant un peu de tout dans le ChériBibi, on espère inciter des gens qui a priori ne liraient pas tel ou tel article à le faire.
On cherche pas à étaler des connaissances hyper pointues, mais à intéresser des lecteurs à des sujets qu’ils ne connaissent pas sans pour autant faire hausser les épaules aux spécialistes – et c’est là qu’on fait le grand écart… En fait, on essaie de faire en sorte que la revue puisse être ouverte par différentes portes – sans ça, on pourrait pas la tirer à 2000 exemplaires. Et ça nous permet, par exemple, de la vendre par le biais de Sin'Art, qui est un site fait par de passionnés de cinéma bis [voir la rubrique "Sin’Art db" – NdR]. Au début ils ont été assez difficiles à convaincre, mais maintenant ils nous prennent chaque numéro. On est distribué chez un disquaire reggae, dans des librairies de littérature générale… Y a différents lecteurs de différents milieux qui vont l’acheter pour différentes raisons et on s’efforce de développer ces "cross over". Par exemple, je suis sûr qu’il y a des fans de reggae qui connaissent rien à la blaxploitation et qui vont lire les articles sur les films de la blaxploitation, de même que des passionnés de blaxploitation qui connaissent rien au reggae vont quand même lire l’autre bout de la banane…

Le principe de publier une nouvelle inédite dans chaque numéro, c’était arrêté dès le départ ou c’est venu parce qu’il y avait de la matière ?
Daniel : C’est venu dès le départ. Ça vient de ce qui se pratique dans des revues et des fanzines que j’adore – j’ai chez moi des tas de cartons remplis de ce genre de revues, et dans plein de domaines différents – notamment des revues de polar. Le problème, c’est que dans certaines d’entre elles, tu as dix nouvelles à la suite, et sept ou huit chroniques de bouquins d’affilée, et ça m’emmerde. Donc j’ai voulu éviter ça dans le ChériBibi. L’idée était de mettre dans chaque numéro du cinéma, de la littérature, une nouvelle, de la musique, du théâtre… et y a une charte pour qu’à chaque fois il y ait tous ces éléments, répartis dans des rubriques définies. Mais on adapte la longueur en fonction des sujets ; la nouvelle peut faire trois pages ou bien dix, la partie musique à peu près un tiers de la revue ou bien un peu plus… À part ça il n’y a pas vraiment de grille – pas question de dire aux mecs "Bon, ben t’as 3000 signes pour traiter ton sujet !" Je tiens à garder ce plaisir que j’avais en faisant le fanzine de composer chaque page come un œuvra pictural, tu vois [en deux gestes et trois mimiques prend corps devant moi un maestro italien… avé l’assent] ! Je veux dire par là que je visualise l’article, l’icono qu’on a réussi à glaner à droite à gauche, et qu’en fonction de ça je décide ce qui mérite des pages couleur – parce que le nombre de pages couleur est limité : on en a que seize – et de leur répartition selon le brochage. Tu verras que dans chaque numéro les pages couleur sont réparties différemment. Tout est dans ce dosage, et je m’amuse énormément. Mais c’est sûr que plus le texte est long, plus j’ai envie de mettre des images… et comme c’est moi qui fais la maquette [rires]… D’ailleurs, pour mes articles, j’ai une méthode : je fais d’abord la maquette des pages avec les images que je veux mettre, et après je regarde la place qui reste pour le texte et j’écris l’article directement sur la maquette, sans passer sous Word parce que sinon je pourrais en écrire trois kilomètres !

Ah, la maquette… Là, le bât blesse ! par exemple, j’ai été très gênée par la petitesse de la police. C’est très dur à lire, d’autant que les illustrations qui sont très nombreuses interfèrent et parfois tuent le texte…
Daniel : C’est le principal reproche qu’on nous fait. Je suis bien conscient de ça, et j’essaie toujours d’améliorer ce point-là, en faisant plus de blancs tournants, des choses comme ça, en me basant sur des maquettes beaucoup plus aérées que j’ai faites pour d’autres journaux – j’ai bossé pendant sept ans à la photocomposition…
Vince : Tout ça est lié à l’histoire du fanzine qui a précédé la revue. Il y avait des numéros qui étaient pliés comme un accordéon, avec un poster caché à l’intérieur… C’était comme de l’origami – et moi qui ne suis pas très soigneux je n’ai plus aucun de ces numéros qui soit entier ! Les pages se sont séparées, ça fait plein de petits papillons !

Tu veux dire que le fanzine ressemblait à ces livres pour enfants dont les pages se déplient ?
Daniel : Oui… mais on peut pas faire ça et tirer à 2000 exemplaires ! Déjà à 300 c’était limite.
Vince : ... et complètement anti-commercial ! En plus c’étaient des formats qui n’entraient dans aucune gondole, ce n’était ni du A4, ni du A3 – il y a eu un numéro qui avait la dimension d’un vinyle 33 tours, d’autres qui avaient une pochette couleur reliée à l’intérieur… et ça a été comme ça jusqu’au dernier, quand on a compris qu’il était temps d’arrêter ces conneries parce que sinon les libraires allaient péter les plombs. Ce dernier numéro était en trois parties…
Daniel : C’était du A3 plié en accordéon, avec dans chaque creux un livret qui tenait par deux agrafes – donc six agrafes puisqu’il y avait trois livrets – et dans chaque livret il y avait encore des feuillets à déplier, dans un sens ou dans un autre… Mais le texte se suivait bien.
Vince : C’était encore le fanzine ; donc on s’adressait surtout à des potes qui nous connaissaient bien… C’était juste avant la grande révolution technologique qui a affecté le ChériBibi depuis maintenant quatre numéros…
Daniel : Y a des survivances de ça dans la façon de procéder : la méthode, c’est un peu de mettre plein de trucs puis après de taper un coup sur l’ordi pour tout faire rentrer…

En matière d’iconographie, Julien [Védrenne, le boss d'ici - NdR] me faisait remarquer qu’elle était très connotée années 1970 ; est-ce une volonté délibérée d’inscrire la revue dans une période précise ou bien est-ce que c’est simplement le résultat d’un goût personnel ?
Daniel : Mes goûts vont des couvertures de littérature populaire du XIXe siècle aux couvertures de la free press américaine des années 1970, en passant par les affichistes polonais et par tout un tas de trucs différents. Mais pour les couvertures du ChériBibi, le principe de changer la typo du titre à chaque numéro et de mettre des images détourées sur fond noir ou de couleur vive a été piqué aux premiers pulps magazines. Des années 1930 à, disons, 1960, c’est ce genre de couverture qui faisait leur force. Après, c’est devenu plus "main stream". Quand je faisais le fanzine, la maquette de couverture c’était colle en bombe, photocopie, cutter. Et retouche au Tipex ou au feutre. Le passage à l’ordinateur, ça m’a obligé à penser de façon tout à fait différente, mais j’ai encore tendance à penser collage et ça doit se voir que j’utilise l’ordinateur comme si j’avais entre les mains le cutter et la colle…
Vince : D’ailleurs son écran est plein de Tipex… C’est vrai que c’est une imagerie qui est très ancrée dans le passé, mais d’un autre côté, à quoi ressemblerait un truc qui serait foncièrement ancré dans l’époque actuelle ? On peut se demander qu’est-ce que la modernité en termes d’iconographie.
Daniel : Et puis on s’en branle au fond de savoir si c’est moderne ou pas. Moi je cherche surtout à ce qu’il y ait une certaine lisibilité – même si c’est loin d’être toujours le cas… Y a des gens qui m’ont dit que la revue leur évoquait les premiers numéros d’Actuel, sauf que les textes en violet sur fond noir, moi j’ai jamais réussi à les lire ! Donc je ferai jamais un truc pareil ! Mais c’est sûr que pour les pages couleur, je me suis un peu calmé par rapport au début… Comme c’était la première fois que je faisais de la couleur, je voulais mettre les textes en rouge, en jaune, etc. Pour la taille du texte, à chaque fois je me dis, bon, cette fois je passe en corps 9. Puis je me retrouve avec trop de trucs à écrire et du coup, je repasse tout en corps inférieur – les bonnes résolutions s’effritent tout le temps ! Notre but, ça reste quand même de faire un canard qu’on a envie de lire… sauf qu’après le bouclage, quand je me suis tapé je sais pas combien de nuits blanches sur ledit canard, je mets un certain temps à avoir envie de le reprendre… Je vois toutes les coquilles qui me sautent à la gueule, et le lendemain d’un bouclage, en général, je déprime !

Daniel, tu es l’auteur du gros dossier – passionnant ! – sur Chéri-Bibi (le personnage de roman) paru dans le numéro 2 de la revue. On te doit également la préface du premier volume des "Aventures de Chéri-Bibi" publié par les éditions Libertalia. Ces deux textes ont-ils des rapports de contenu et, si oui, lequel a précédé l’autre ?
Daniel : C’est très simple ; l’un des animateurs de cette maison est un pote. Il connaît ma passion pour ce personnage, il sait que j’ai la collection presque complète de toutes les éditions – j’ai même étonné les gens de la BNF, quand ils ont fait l’expo Gaston Leroux… (et j’ai appris à ce moment-là qu’à la BNF, tous les fascicules parus avant 1945 – pour la date, je suis pas tout à fait sûr – étaient dépouillés de leur couverture pour être reliés avec des reliures de bibliothèque ! et toutes ces belles couvertures illustrées sont parties à la poubelle !) – et il m’a demandé conseil quand il a eu l’idée de rééditer tous les romans de Chéri-Bibi qui étaient libres de droits, donc particulièrement intéressants pour une petite maison comme Libertalia. Il m’a proposé de faire une préface, alors je lui ai sorti le dossier que j’avais fait pour le numéro 2. Il voulait le passer tel quel. Mais j’ai pas voulu parce que dedans je révèle des fils de l’intrigue, or si on fait une préface, c’est pour qu’elle soit lue AVANT, et je déteste qu’on me dise avant de lire un bouquin ce qui va se passer dedans. Donc j’ai gardé l’essentiel du dossier mais en enlevant tout ce qui pouvait dévoiler l’histoire. Et comme il doit sortir le deuxième tome, je reprendrai tout ça pour une postface – que je dois d’ailleurs écrire !*

* Rappelons que la conversation se tenait à la fin du mois d’août… Ce deuxième tome des "Aventures de Chéri-Bibi", Chéri-Bibi et Cécily, est désormais présent sur les étals des (bons) libraires, mais Daniel n’a pas eu le temps d’écrire la postface dont il rêvait, c’est donc la prose d’un autre contributeur qui accompagne les romans de Gaston Leroux. Il a quand même laissé son coup de patte en quatrième de couverture…. Quant au numéro 5 de la revue, son contenu se profilait alors de manière assez précise et nous n’allons pas tarder à pouvoir confronter les intentions annoncées avec le résultat effectif – un certain écart s’est paraît-t-il creusé…

La suite au(x) prochain(s) numéro(s)…

[À Daniel] Tu as dit tout à l’heure que tu avais de quoi remplir plusieurs numéros de la revue ; concrètement, qu’est-ce que tu as prévu pour le numéro 5 ?

Daniel : Déjà on va essayer de le sortir pour octobre-novembre. Comme dans les autres numéros, y aura tout un tas de choses – un sujet sur Wanda Jackson, sur les films de Kung fu féministe, sur Musidora… Et y aura beaucoup de matière sur le polar. Par exemple, je vais évoquer une collection des années 1950 qui n’existe plus et dont les bouquins ont jamais été réédités. C’est une collection que j’adore, mais je vais pas en parler davantage parce que voudrais essayer de choper tous les volumes encore trouvables avant la sortie du ChériBibi – il se pourrait qu’après, il y ait 2000 lecteurs qui se ruent à la recherche de ces bouquins, qui sont déjà très difficile à trouver parce qu’à l’époque ils ont été censurés et que la plupart des exemplaires ont été passés au pilon. Après m’être intéressé aux œuvres du début du XXe siècle – la série des Zigomar, des Fantômas, les bouquins de Gaston Leroux, de Jean de la Hire, etc. – ça fait pas mal d’années que je récupère des petits polars des années 1950-60 dans les brocantes, les vide-greniers… et c’est comme ça que j’ai découvert un auteur comme André Héléna. Et j’épluche tous ces bouquins, du coup je prépare plusieurs sujets, mais je parlerai pas forcément d’André Héléna en premier – faut que je me sente assez prêt pour ça. Sinon, y aura aussi un dossier sur Doris Wishman (1er juin 1912-10 août 2002), une réalisatrice américaine de la sexploitation. Son mari voulait pas qu’elle fasse du cinéma – et surtout pas des films avec des gonzesses à poil pour un public majoritairement masculin. Mais elle, elle voulait faire du cinéma, et elle a fait que ça jusqu’à quatre-vingt-dix ans ! Comme elle a commencé à une époque où la femme restait au foyer pendant que le mari allait au travail, elle a fait ses films après la mort de son mari. C’est vachement important de savoir ça parce que ça montre que le contexte de production est déterminant… et on peut pas parler d’un artiste sans s’intéresser aux conditions dans lesquelles il travaille. À propos d’une interview que j’ai faite de Rico Rodriguez [à lire dans le ChériBibi n° 3 – NdR], un tromboniste jamaïcain, dans laquelle il était beaucoup question de la difficulté de se procurer un instrument dans son pays, du fait qu’un musicien est très peu payé quand il joue, un lecteur m’a dit "C’est chiant parce que Rico Rodriguez, il ne parle que de fric" et je lui ai répondu "Oui, mais ce sont les conditions objectives de production de musique reggae dans un pays du tiers-monde, donc je trouve ça très bien qu’on ait parlé de ça, on aurait parlé d’autre chose, j’aurais été content aussi"…

Et sur le long terme, au-delà de la préparation de ce prochain numéro (et de tous les pré-sommaires qui attendent d’être alimentés…), qu’est-ce qui se profile à l’horizon chéribibin ?
Daniel : Pour le moment, on sait que sans pub et sans aide, on arrive à sortir deux fois par an 2000 exemplaires d’une revue de 92 pages avec 16 pages couleur. Mais on voudrait aller plus loin. On va sortir un peu de notre trou pour essayer d’obtenir des subventions publiques – parce que l’argent public c’est le nôtre, je paie des cotisations sociales donc j’ai aucune raison d’avoir honte de demander de l’argent à l’État. Et ce fric-là servira à faire quelque chose en plus – plus de pages couleur, plus gros tirage ou meilleure distribution, ça j’en sais rien. L’ambition, c’est de pouvoir vivre du ChériBibi ; c’est une belle utopie mais elle est pas irréalisable – elle est juste irréalisée.

L’engagement dans la réalisation du ChériBibi a beau virer à la monomanie chez Daniel, il y a tout de même des sollicitations extérieures qui finissent par mettre un terme aux exposés les plus passionnés. Vint un moment où Vince fit valoir certaines obligations horaires – des rendez-vous à honorer, des amis à retrouver… Nous dûmes donc briser là et quitter la place. De toute façon, mes deux interlocuteurs, fumeurs invétérés, avaient à satisfaire une envie d’en griller une qui commençait d’être pressante et exigeait que l’on sorte – loi antitabac oblige.
Voilà : je savais désormais du
ChériBibi et de ceux qui le font à peu près tout ce que je voulais savoir. Mais pour le simple plaisir de les écouter, je serais bien restée en compagnie de Daniel et de Vince une ou deux heures de plus…


Liens : Daniel Paris-Clavel | Gaston Leroux | Chéri-Bibi volume 1 : Les Cages flottantes | On y va | ChériBibi Propos recueillis par Isabelle Roche

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