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Sharko n'avait rien connu d'autre que le 36. Ses cent quarante-huit marches usées jusqu'à la corde, ses odeurs de vieux bois et de tabac, ses mansardes agonisantes, ses bureaux exigus, son séchoir où l'on entreposait parfois les vêtements faisandés des cadavres, juste sous les toits en zinc. On atteignait peut-être les quarante degrés sous les combles, mais c'était chez lui.
Franck Thilliez - Sharko
Couverture du livre coup de coeur

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samedi 27 avril

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Ma vie des autres (132)

Ma vie des autres (132) Courts récits de 1000 signes. 132 : retour de pique-nique. La petite troupe respire le bonheur sur la photo qui ne parvient pas à s'effacer dans ma tête. Ce qui me reste en mémoire n'a pas l'exactitude de cette image banale dans la revue que j'ai feuilletée avant-hier dans la salle d'attente de mon cardiologue. Je recompose des attitudes, je reste dans l'à-peu-près, mais la similitude exacte n'a pas d'importance. Les yeux ne scannent pas. Ils filtrent des émotions. Cela suffit à donner de la chair à des fantômes. En habits militaires, mais débraillés, une quinzaine d'hommes et de femmes sont à l'arrêt à l'entrée d'un pont de pierre. L'un grimace, les autres sourient. Aucun n'est au garde-à-vous. Contre le muret, à droite, un soldat à casquette joue de l'accordéon. Il est possible qu'ils entonnent à l'unisson un air traditionnel. Visages rougeauds, bien que le cliché soit en noir et blanc, et ventres gonflés disent qu'ils sortent de table ou qu'ils reviennent d'un pique-nique sous le ciel lumineux. Je n'ai jamais été aussi mal à l'aise devant une photo qui n'aurait l'air de rien si une légende ne précisait pas qu'il s'agissait d'une simple pause du dimanche des gardiens d'Auschwitz.

Mille signes. Autant de preuves de vie adressées à autrui que de caractères dans chaque fiction. Chacun à mille existences et chacun est en miettes. "Ma vie des autres" collecte ces miettes et en fait un chemin de cailloux blancs ou noirs qui mène forcément quelque part.

Jan Thirion
Blog de Jan Thirion
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Par La Rédaction



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