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Ma vie des autres (80)
Courts récits de 1000 signes (80). Moi, je voudrais bien avoir plus de responsabilités dans l'association. J'ai des idées à faire partager. Encore faudrait-il qu'on change cette manière de classer les gens qui sclérose les bonnes volontés, chacun étant considéré non pas selon ses qualités, mais selon son grade. Est-il normal qu'un juriste comme moi, aveugle à cause d'un accident de guerre, soit en-dessous d'un militaire malvoyant, qui l'est devenu lors d'un conflit ou en temps de paix ? Oui, je comprends que les anciens soldats aveugles veulent garder la mainmise sur la maison d'entraide qu'ils ont créée et qui s'est transformée, grâce aux dons et aux subventions, en inestimable entreprise immobilière. Ils craignent que de mauvais gestionnaires dilapident rapidement l'empire qu'ils ont bâti. J'essaie de convaincre les officiers qui dirigent. Pas facile. Après la guerre, je n'ai pas eu de chance. J'étais enfant, j'ai ramassé une grenade dans un champ de patates. Elle m'a explosé à la figure, me privant de la vue définitivement. Un accident civil. Mais dans l'organisation de l'association des aveugles de guerre, ça ne pèse pas lourd.Mille signes. Autant de preuves de vie adressées à autrui que de caractères dans chaque fiction. Chacun à mille existences et chacun est en miettes. "Ma vie des autres" collecte ces miettes et en fait un chemin de cailloux blancs ou noirs qui mène forcément quelque part.
Jan Thirion
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