Adieu mes frères

Roman - Thriller

Adieu mes frères

Discussion sur l'engagement

2014 à New York. Alex est un petit fils d'émigré égyptien. Suite aux événements qui secouent le monde, il décide de se joindre à l'État islamique et de partir faire le djihad. Mais il est toujours en contact avec son grand-père Ali resté aux États-Unis. Et Ali va lui raconter sa jeunesse en Égypte. Pourquoi il est parti et dans quelles circonstances. Le récit du grand-père qui se déroule en 1954 au Caire va donc être ponctué de réponses par mail du petit-fils montrant la rapide montée et déliquescence de l'État islamique. Ali est un cinéphile convaincu qui a décidé de tenter la grande aventure du cinéma dans l'Égypte des années 1950, alors que le roi vient à peine d'être détrôné et remplacé par un dictateur qui sera renversé et remplacé par un autre, Nasser, le récit s'ouvrant sur les premiers jours de ce nouveau régime. Il est là-bas avec son amoureuse qui se rêve star de cinéma et un cousin lié aux Frères musulmans. Ces derniers enragent car ils ont aidé à renverser le roi mais n'ont pas engrangé de bénéfices au sein du nouveau gouvernement. Ils sont en outre surveillés par les services secrets militaires. Quand Ali, sur le tournage des Dix commandements de Cecil B. DeMille, va renverser un imam alors qu'il conduit une voiture qui se fraie un chemin à travers une manifestation hostile aux étrangers, son avenir va s'en trouver chamboulé. Il n'a d'autre choix que de se rapprocher de son cousin et des Frères musulmans tout en faisant face à l'irascibilité du réalisateur américain. Quel sera le prix à payer pour sa sauvegarde ?

Menant en parallèle deux histoires en s'inspirant de faits réels (si les contemporains connaissent mieux peut-être la montée en puissance puis la chute de l'État islamique évoqué ici de manière très courte sans pathos par un garçon un peu perdu, il n'en est peut-être pas de même sur l'Égypte des années 1950-1960 et le foisonnement des idées islamiques qui allait fonder la matrice de ce que nous voyons actuellement, ni même sur Les Dix commandements). Les deux récits sont écrits à hauteur d'homme, sans volonté de misérabilisme ou de créer de l'empathie ou de l'antipathie pour l'un ou l'autre des camp. Peter Blauner prend son temps pour décrire son intrigue, poser ses personnages, éviter les scènes horribles pour les suggérer. Il nous propose ainsi une histoire où les hommes ont encore leur place dans un monde qui cherche à les écraser, où l'on peut choisir, où l'on n'est pas obligé de suivre une idéologie, une violence, un fantasme, mais où l'on peut encore rester un peu humaniste dans un monde qui devient inhumain.

Citation

Parce que, la vérité, c'est que ton ennuyeux grand-père, Ali Hassan, le propriétaire de la station-service à la peau parcheminée, avec son eau de Cologne de vieillard et ses blagues ringardes a passé de nombreuses années en prison en tant que criminel violent et qu'il y a laissé son œil gauche au passage.

Rédacteur: Laurent Greusard mercredi 14 février 2024 partager : | |