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Franchement, moi, j'ai honte de faire partie de l'espèce humaine. Ce que j'aurais voulu, c'est être un oiseau de proie, les ailes démesurées, voler au dessus de ce monde avec l'indifférence des puissants. Un poisson des abysses, quelque chose de monstrueux, inconnu des plus profonds chaluts. Un insecte, à peine visible. Tout sauf homo sapiens. Tout sauf ce primate au cerveau hypertrophié dont l'évolution aurait mieux fait de se passer. Tout sauf le responsable de la sixième crise d'extinction qu'aura connue cette pauvre planète. Parce que l'histoire des hommes, c'est surtout ça. L'histoire des hommes, c'est l'histoire d'une défaunation à grande échelle, des deuils animaux à n'en plus finir.
Colin Niel - Entre fauves
Couverture du livre coup de coeur

Coup de coeur

Bleus, blancs, rouges
Paris, fin des années 1970. Les années Giscard, le disco, une certaine idée d'un pays figé et conserv...
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dimanche 15 juin

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Ma vie des autres (154)

Ma vie des autres (154) Courts récits de 1000 signes. 154 : vision champêtre. Voiture en panne. Pas de panique. Il fait beau. J'ai mon après-midi. J'ai le temps. Je laisse la Clio sur le parking de l'entreprise. Je rentre à pied à travers la campagne. Maureen sera surprise de me voir revenir si tôt. J'ai oublié mon portable en partant ce matin. On aura le temps d'aller en ville et de se faire un restau, plus un film. De marcher me fait le plus grand bien. Je prends cette balade forcée comme un cadeau du ciel. La nature est belle et je me sens en pleine forme. J'ai tendance à m'empâter. Un peu de sport ne me ferait pas de mal. Je repousse toujours à plus tard. Dans la montée vers l'ancienne chapelle, je tire la langue. La côte est raide et je n'ai pas les chaussures idéales pour la randonnée. Une fois la butte franchie, c'est mieux. Je m'hydrate avec un petit pack de jus de raisin acheté au distributeur de boissons de l'entreprise. À cinq cents mètres du hameau où je réside, j'aperçois dans le lointain des animaux qui s'ébrouent dans un bosquet. Daims ou sangliers ? Ou des chiens simplement. Je ne bouge pas. Je reste dissimulé. Les bêtes sont humaines. Elles se rhabillent. Je reconnais Noé, le carreleur qui doit nous refaire la salle de bains. De dos, la femme qui sort des fourrées ressemble à Maureen à s'y méprendre.

Mille signes. Autant de preuves de vie adressées à autrui que de caractères dans chaque fiction. Chacun à mille existences et chacun est en miettes. "Ma vie des autres" collecte ces miettes et en fait un chemin de cailloux blancs ou noirs qui mène forcément quelque part.

Jan Thirion
Blog de Jan Thirion
Liens : Jan Thirion
Par La Rédaction



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